
Le pitch : Sarah, Jessica et Chanel, trois amies inséparables issues de la banlieue parisienne, sont venues faire les mules dans une île des Caraïbes pour ramener de la drogue en France et enfin ouvrir leur business de Nails Bar. Mais le voyage est bouleversé lorsque, après s’être fait arrêtée à l’aéroport, Jessica disparaît totalement des radars… Incapable d’abandonner leur copine, Sarah et Chanel se lancent à sa recherche dans les bas-fonds de l’île… sans savoir que ce qu’elles vont découvrir dépasse de loin tout ce qu’elles auraient pu imaginer…
Pour être honnête, quand j’ai vu le film arriver, je me suis dit que ça allait être un autre Going to Brazil où le trafic de drogues remplacerait le meurtre par accident, tout en glamourisant la “vida loca” sous les tropiques. À l’arrivée, j’ai été happée par une spirale de violence et de tension prenante et, surtout, étonnante. Avec Coka Chicas, Roxine Helberg (Cold Copy, The Girl in the Woods…) livre un film d’apprenties gangsters au féminin un poil éparpillé, entre course contre la montre et rencontre musclée qui n’aurait presque rien à envier aux films de genres portés par des hommes.

Coka Chicas commence comme une carte postale. Trois amies, trois sœurs de cœur, qui sirotent des cocktails sur une plage paradisiaque, ça n’a rien de surprenant. Cependant le film de Roxine Helberg ne perd pas de temps à annonçant rapidement la couleur, à travers les véritables intentions du trio, et bien sûr, rien ne se passe comme prévu. Coka Chicas accroche immédiatement en cristallisant toutes les craintes de voyageurs (se faire bloquer à la douane avec suspicion de trafic de drogue, entre faits divers et réalité – voir Bridget Jones 2 pour une version light de cette réalité) et la disparition de l’une des protagonistes entrainent les deux autres dans une course contre la montre dans un monde où elles n’ont aucune prise.

Le film évolue dans un univers violent qui transforme la carte postale des débuts en un lointain souvenir alors que que l’histoire sème des embûches sur la route. Entre une administration impuissante et des interlocuteurs louchent, Coka Chicas ne flirte pas avec le danger : il l’incarne. Si parfois la survie des protagonistes est discutable (mais c’est le cas de beaucoup de films d’action au final, qu’il s’agisse du dernier Mission Impossible ou d’un Anti-Gang frenchy), le film fait vite oublier ses maladresses en proposant une descente aux enfers frontale et musclée. Loin de faire de ses héroïnes des victimes, c’est à l’arme et aux poings qu’elles vont se battre pour leur survie. Le film de Roxine Helberg coche sans doute toutes les cases des clichés attendus, mais il a aussi le mérite de pointer du doigt des dangers bien réels – ceux qui se dissimulent derrière les cartes postales de vacances de rêve, nourris par la pauvreté et la loi du plus fort.

Le point fort du film, c’est qu’il ose salir ses protagonistes. Si on s’imaginait trois princesses qui crieraient au secours à la moindre incartade, c’est bien mal appréhender le film. Coka Chicas préfère jouer – à raison ! – la carte d’amazones débrouillardes, en portrayant des personnages prêts à en découdre, capable d’encaisser le pire… et de le rendre. L’ensemble assume son identité d’actioner punchy, violent et agressif, qui ne détourne jamais le regard. Roxine Helberg nous plonge dans une spirale nerveuse et haletante qui, à chaque nouvelle strate, révèle une réalité choquante dont on ne parle pas assez (la traite d’humains).
Là où on a plus souvent l’habitude de voir des personnages masculins dans ce type de récit, le film de Roxine Helberg détonne et parvient même à éviter la piège facile de la sexualisation inutile de ses personnages, pour se concentrer sur un rapport de force haletant et percutant. Bref, on est sur une très bonne surprise !

Au casting, le film est porté par un trio accrocheur, notamment grâce à Fadily Camara (Pas de Vagues, En Place, Enterrement de Vie de Garçon…) qu’on découvre dans un rôle percutant et à contre-courant. Alors qu’on la connait humoriste, l’actrice joue ici un personnage d’une intensité folle qui fait monter d’un cran la nervosité ambiante. À ses cotés, Zoé Marchal (SKAM France, Narvalo, Tapie…) et Eva Huault (Le Roi David, Le Dernier des Juifs…) sont également convaincantes, l’une en instigatrice dépassée qui reprend du poil de la bête en cours de route, l’autre en grande gueule attachante.
En conclusion, Roxine Helberg signe un thriller surprenant, tendu et sans fard, porté par un trio féminin qui ne lâche rien. Coka Chicas est une virée sous les tropiques qui cogne là où ça fait mal, bien loin des clichés de carte postale et girly. À voir et à encourager, pour avoir plus de films de genre en France (au féminin ou pas).

