
Le pitch : Journaliste politique en disgrâce placée à la rubrique football, Mlle Pove est sollicitée pour suivre l’entre-deux tours de la campagne présidentielle. Le favori est Pierre-Henry Mercier, héritier d’une puissante famille française et novice en politique. Troublée par ce candidat qu’elle a connu moins lisse, Mlle Pove se lance dans une enquête aussi étonnante que jubilatoire.
En 2021, Albert Dupontel faisait la fierté du cinéma français avec le film Adieu Les Cons, couronné, notamment, par 4 Césars : Meilleure réalisation, Meilleur film, Meilleur scénario original et le César des lycéens. En général, Dupontel et moi, c’est assez aléatoire : si j’apprécie son ton faussement aigri qui dénonce et s’amuse des travers de l’humain et de la société qui nous entoure, ses premiers films comme Bernie, Enfermés Dehors ou encore Le Vilain m’ont plutôt laissée de marbre. Je pense qu’Albert Dupontel est une contradiction intéressante : il crée un cinéma populaire qui ne trouve pas toujours son public en raison de son humour sardonique et de sa tendance à explorer des personnages marginaux, ce qui peut parfois dérouter, voire repousser. Cependant, au fur et à mesure que la filmographie d’Albert Dupontel s’étoffe, son style et ses sujets s’affinent. Si je n’ai que moyennement apprécié Adieu Les Cons (sans le détester pour autant), j’avais adoré le tableau ambitieux et merveilleux qu’était Au Revoir Là-Haut en 2018 ou encore l’accessibilité hilarante 9 Mois Ferme en 2014.

Cette année, c’est avec des plans filmés avec des drones et un fil conducteur multiple que le réalisateur revient avec Second Tour, une comédie satyrique entre politique et secrets de famille. Porté par la curiosité d’une journaliste rebelle, le film suit les derniers jours de la campagne électoral d’un homme aux apparences irréprochables. Toujours empreint par l’humour particulier du réalisateur, la comédie et l’intrigue permet au spectateur de s’immerger rapidement dans cette investigation alléchante. Second Tour propose une première partie attrayante, posant impeccablement ses personnages et parvenant à capter l’attention.

Oui mais voilà : malgré sa courte durée, Second Tour a tendance à s’éparpiller parmi ses fils conducteurs pour faire durer le suspens. Plans mystères, origines complexes, gardes du corps qui se bastonnent et quête de vérité, le film d’Albert Dupontel a tellement envie de faire durer le plaisir qu’il a aussi pris le risque de lasser en cours de route, à force de vouloir en garder sous le coude. Second Tour subit un sacré ventre mou pendant lequel les ramifications de son intrigue semblent tourner à vide, avant d’offrir un rebondissement digne d’un soap opera des années 80-90. J’aurai préféré que le sujet politique reste au centre, pour mieux révéler le mystère qui entoure la campagne de ce protagoniste mystifié. Au lieu de cela, comme pour éviter de devoir expliquer un plan impossible, Second Tour reste en surface et se réfugie derrière la facilité d’un retournement de situation tout aussi peu crédible. Si l’ensemble fonctionne finalement bien, parvenant à boucler la boucle tout en fustigeant les apparences bourgeoises d’une famille bienséante, le film d’Albert Dupontel m’a donné l’impression de botter en touche.

À la réalisation, le réalisateur s’aventure et se partage entre des plans intérieurs étouffants et suspects, et des plans extérieurs, aériens et rafraichissant. Second Tour souligne sans véritable subtilité la froideur mécanique du monde urbanisé et politisé, entre quête de pouvoir et de contrôle, en l’opposant à la simplicité tendre et facilement émerveillable des paysages plus campagnards. Les décors sont simples, parfois même rustiques, mais réussis, parvenant à symboliser le contraste entre ces deux mondes. Bien que la métaphore puisse sembler un brin simpliste, elle remplit largement son rôle.

Au casting, heureusement, ce n’est que du bonheur et c’est également l’un des meilleurs atouts du film. L’irresistible Cécile de France (La Passagère, Les Jeunes Amants, Salade Grecque…) est toujours un subtil mélange bien dosé de charme, de maladresse et d’assurance qui fait toujours mouche, tandis qu’Albert Dupontel est plutôt en retrait à travers un rôle souvent froid. Autour d’eux, Nicolas Marié (Adopte Un Veuf, Jumeaux Mais Pas Trop…), toujours fidèle aux cotés du réalisateur, brille de mille feux tout au long du film, apportant une dose d’humour irrésistible.
En conclusion, les fans du cinéma d’Albert Dupontel sauront probablement y trouver leur compte, pour ma part Second Tour a beau réunir les ingrédients phare du cinéma de son réalisateur, l’aboutissement utopiste et survolé ne m’a pas convaincue. À tester.

