Épouvante-horreur

[CRITIQUE] Substitution – Bring Her Back, de Michael Philippou et Danny Philippou

Le pitch : Un frère et une sœur découvrent un rituel terrifiant dans la maison isolée de leur nouvelle famille d’accueil.

Deux ans après La Main, le duo Michael Philippou et Danny Philippou revient avec Substitution – Bring Her Back un film d’horreur troublant et glaçant, à l’ambiance poisseuse et à l’écriture trouble, qui creuse à nouveau le sillon du deuil, mais avec un regard plus obscur, plus opaque. À mi-chemin entre la rencontre improbable du Hérédité d’Ari Aster et de Get Out de Jordan Peel sur certains aspects (pas les plus attendus), Substitution se fraye un chemin certain dans l’elevated horror à travers un film perturbant.

Comme l’opus précédent, les réalisateurs prennent un plot narratif attendu et s’éloigne de la trame prévisible et facile qui leur tendait les bras. Substitution mise sur l’inconfort et le malaise, qu’on le veuille ou non, à travers l’introduction d’une jeune héroïne malvoyante qui vient chatouiller la bienséance politiquement correct du spectateur. Après un événement tragique, la jeune fille et son frère au passif turbulant sont accueillis par une mère d’accueil, en attendant un éventuel placement définitif.

Dès l’arrivée dans leurs nouveaux foyers, le film pose des bases incertaines. De l’attitude étrange de leur hôte envers la jeune fille à la présence d’un jeune garçon mutique, le film ne cesse d’osciller entre des moments de rapprochements salvateurs qui contrastent avec des apartés inquiétants. En effet, le film distille dans sa trame des scènes troublantes autour d’un des personnages, qui semblent vivoter autour de cette cellule familiale de fortune sans jamais l’intégrer.

Rapidement, ce qui est insinué devient frontale, Substitution cumule des moments glaçants qui m’ont fait décrocher la mâchoire, installant une ambiance pleine de malaise et d’effroi, sans pour autant donner de réponse. Entre mutilation et démonstration macabre, le film force les spectateurs à naviguer à vue, au fur et à mesure que le film avance. Si les intentions de certains deviennent claires, les motivations sont brillamment tenues à distance pour maintenir un climat anxiogène, autour des jeunes ados qui, chacun pour leurs propres raisons, se retrouvent à la merci des adultes sensés les protéger.

Quelques parts entre l’emprise psychologique et le paranormal, Substitution se  prend de l’ampleur en mêlant l’angoisse au drame personnel qui anime les personnages. Des traumas d’enfance à la perte d’être cher, les Philippou apportent une densité palpable à l’histoire, qui permet au film d’être plus qu’un énième film d’horreur estival. L’empathie est présente, ce qui permet à la tension insidieuse de faire son effet tandis que l’ensemble atteint un final abouti.

À l’instar des films de genre du même acabit (Longlegs, Midsommar ou encore Titane pour en citer quelques-uns), Substitution ne cherche pas la facilité et nous enfonce dans les méandres de l’inconfort et du gore (gentillet). Ici, pas de jumpscare ni d’obscurité commode pour masquer une direction artistique défaillante (ou absente), les Philippou livrent un film marquant, à la fois par son propos mais également par son approche souvent sinistre, qui reste en mémoire bien après la fin de la séance. La mise en scène maîtrisée du duo s’appuie sur des artifices sobres mais redoutablement efficaces, qu’il s’agisse de ce qui se distingue en arrière-plan ou d’un design sonore volontairement trouble.Ce n’est peut-être pas de la peur brute, mais Substitution est un film dérangeant, parfois saisissant et surtout efficace.

Au casting : Sally Hawkins (Wonka, Spencer, La Forme de l’Eau…) incarne cette mère d’accueil envahissante et troublante avec brio, aux cotés de Sora Wong et Billy Barratt (Kraven The Hunter, Invasion…), tous deux convaincants et rapidement attachants. C’est surtout Jonah Wren Phillips qui livre une performance qui prend aux tripes et porte la majeure partie de la tension horrifique du film.

En conclusion, Substitution – Bring Her Back confirme le talent singulier du duo Michael Philippou et Danny Philippou, pour tordre les codes de l’horreur en y injectant une noirceur humaine glaçante. Un film qui dérange autant qu’il captive par son ambiance anxiogène et glaçant. À voir.

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