
Le pitch : Plusieurs générations après le règne de César, les singes ont définitivement pris le pouvoir. Les humains, quant à eux, ont régressé à l’état sauvage et vivent en retrait. Alors qu’un nouveau chef tyrannique construit peu à peu son empire, un jeune singe entreprend un périlleux voyage qui l’amènera à questionner tout ce qu’il sait du passé et à faire des choix qui définiront l’avenir des singes et des humains…
Sept ans après la conclusion mémorable de la trilogie signée par Rupert Wyatt puis Matt Reeves, la 20th Century Studios (Disney, donc) propose une suite avec La Planète des Singes : Le Nouveau Royaume, réalisée par Wes Ball (Le Labyrinthe et ses suites, La Terre Brûlée et Le Remède Mortel…). Le défi est de taille : prolonger une saga acclamée, tout en soulevant une nouvelle question : les humains et les singes intelligents peuvent-ils cohabiter ?
Avant de creuser son sujet de fond, le film explore l’héritage laissé par Cesar, à travers une introduction entre rituel et clan familiale soudé. Dans les lignées de ses prédécesseurs, le film montre des singes désormais bien plus à l’aise avec la parole et plus organisés. Rapidement, La Planète des Singes : Le Nouveau Royaume” va mettre en lumière l’existence de clans divers et des scissions au sein de l’espèce. L’héritage de César n’est plus qu’une légende oubliée ou déformée, à l’instar d’une religion ancienne. Deux visions s’affrontent : d’un côté, ceux qui aspirent à la paix, et de l’autre, ceux qui cherchent à assouvir leur soif de pouvoir.

Difficile de rivaliser avec la trilogie précédente – et surtout les deux derniers films de Matt Reeves – qui avait brillamment bouclée la boucle avec une puissance émotionnelle et une cohérence narrative exemplaires. S’attacher à de nouveaux personnages, plus de 300 ans après l’histoire de César, n’est pas une tâche facile. Le film de Wes Ball peine à atteindre le même niveau d’engagement, malgré une intrigue intéressante et des moments de tension captivants.
Globalement, Wes Ball propose un film dynamique, bien qu’un poil trop long. On y retrouve les codes de la franchise et l’intrigue est maladroitement calquée sur celle de Suprématie, alors qu’on suit le jeune Noa qui tente de sauver sa famille, capturée par les griffes d’un méchant – qui utilise les mêmes méthodes que le personnage de Woody Harrelson dans Suprématie. Entre quête de pouvoir, rencontre avec un personnage humain et le souvenir lointain des paroles de César, le film tricote sur du déjà-vu et des références aux autres films, sans pour autant proposer grand chose de nouveau. Au cours d’une double intrigue, le film survole les restes de traces de l’humanité et s’encombre de nombreux fils conducteurs qui ont bien du mal à cohabiter ensemble.

Visuellement, on retrouve la qualité des films précédents tandis que La Planète des Singes : Le Nouveau Royaume expose ses personnages à de nouveaux éléments (dont l’eau, ce qui rappelle douloureusement une certaine scène dans la version de Tim Burton !). Si le film parvient rallier facilement le spectateur aux cotés du héros, Wes Ball livre un récit balisé, teinté de familiarités à tous les étages afin de fédérer et gagner en sympathie. Cependant, les creux scénaristiques et les questions soulevées par le film résultent d’une post-production compliquée, marquée par de nombreuses réécritures dans les dernières semaines.

Mais le récit laisse apparaître des creux dans la narration et ceux dès les premières minutes (pourquoi des aigles ? Comment ces humains-là ont-ils survécu ? Pourquoi un enterrement viking ?!). J’ai espéré des réponses tout au long du film, mais plus il avance et plus il devient évident que La Planète des Singes : Le Nouveau Royaume s’espère en préambule à une nouvelle séquelle si le succès monétaire est au rendez-vous. En effet, le film semble vouloir inverser ou annuler les efforts de la première trilogie. Celle-ci avait brillamment déplacé le curseur. Dans Les Origines, nous étions du côté des humains. Dans L’Affrontement, nous étions au centre. Finalement, dans Suprématie, nous adhérions entièrement au camp des singes, tandis que les humains étaient en voie d’extinction et redevenus primaires.

Avec ce nouvel opus, La Planète des Singes : Le Nouveau Royaume semble vouloir faire marche arrière, risquant de saboter le succès de ses prédécesseurs et de minimiser la responsabilité humaine dans cette histoire dystopique. En réalité j’aurais aimé que le film s’engage vers une intrigue plus audacieuse, à savoir revisiter le tout premier film de 1968, en mettant l’unique personnage féminin en parallèle avec celui de Charlton Heston. Malheureusement, en choisissant une narration qui n’a de richesse que son réalisme graphique, La Planète des Singes : Le Nouveau Royaume fait l’effet d’un acte manqué, reprenant certains ingrédients sans parvenir à captiver pleinement.

Au casting et surtout en motion-capture, Owen Teague (The Stand, Ça : Chapitre 1 et 2…), Kevin Durand (Locke & Key, Swamp Thing…) ou encore Peter Macon (Shameless…) marchent dans les pas de Andy Serkis, Toby Kebbell, Karin Konoval ou encore Terry Notary. À savoir que, les acteurs campant les singes à l’écran suivent une formation dans un “camp d’entraînement pour singes” pendant huit semaines ! Coté humains, ce sont Freya Allan (The Witcher, The Third Day…) et William H. Macy (Ricky Stanicky, Room…) qui joueront les “échos” (wink wink) d’une civilisation perdue.
En conclusion, La Planète des Singes : Le Nouveau Royaume tente de raviver une saga à succès, mais ne parvient pas à égaler la profondeur et l’innovation de la trilogie précédente. Le film de Wes Ball souffre de la comparaison et malgré quelques moments captivants, l’ensemble reste néanmoins dommage et anecdotique. À tenter.

