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[SÉRIE TV] Locke & Key : La BD vs la série

Le pitch de la série : Après le meurtre de leur père dans d’étranges circonstances, les frères et sœur Locke emménagent avec leur mère à Keyhouse, leur maison ancestrale, où ils découvrent des clés magiques potentiellement liées à la mort de leur père. Alors que les enfants Locke explorent les pouvoirs uniques de ces clés, un mystérieux démon s’éveille et ne reculera devant rien pour les leur voler.

Créée par Carlton Cuse et Joe Hill
Avec Darby Stanchfield, Connor Jessup, Emilia Jones…
Disponible sur Netflix

Début février dernier, la plateforme Netflix mettait à disposition la nouvelle série Locke & Key, adaptée de la série de comics écrite par Joe Hill (le fils de Stephen King) et dessinée par Gabriel Rodriguez entre 2008 et 2013. L’histoire démarre après le meurtre du patriarche, la famille Locke part s’installer dans la maison familiale Keyhouse (dans la ville de Lovecraft dans les comics, référence évidente à l’auteur et à Cthulhu). Rapidement, les enfants découvrent l’existence de clé magique et surtout la présence d’une créature prête à tout pour récupérer les clés et ouvrir la Porte Noire – un portail vers une dimension infernale. En six tomes, Locke & Key s’inscrit comme une aventure fantastique à la fois dense, originale et suffisamment noire pour distiller un suspens dévorant qui m’a fait tourner les pages à toute allure.
Pourtant, malgré son succès papier, l’adaptation a mis du temps avant d’arriver : depuis 2010, ce sont les studios de la Fox qui détienne les droits et un casting est même mis en place. Mais le pilot ne dépassera jamais le Comic Con de San Digo en 2011. Trois ans plus tard, une rumeur court autour d’une adaptation en trois volets au cinéma, annoncé par Universal Pictures. Là encore, Locke & Key végete. En 2017, c’est au tour du network Hulu d’approuver le pilote développé par Carlton Cuse et Joe Hill, réalisé par Scott Derrickson (L’Exorcisme d’Emily Rose, Sinister, Doctor Strange…). C’est probablement ce dernier projet qui a dû forcer le réalisateur à quitter le projet, il sera remplacé par Andy Muschietti (Mama, Ça Chapitre 1 et  Chapitre 2). Mais encore une fois, la série fait face à un mur, Hulu refusant de produit la série. En 2018 c’est finalement Netflix qui négocie la production et qui lance le projet. Andy Muschietti quitte le projet mais reste producteur aux cotés de Carlton Cuse et Joe Hill. Courant de la même année, une nouvelle version de la série est écrite par Joe Hill et est enfin approuvée.

La question c’est : pourquoi le projet a-t-il mis autant de temps à voir le jour ? Peut-être à cause de la noirceur des comics qui, comme nous le verrons par la suite, est aux abonnés absents du format série. En effet, les premiers réalisateurs accolés aux projets sont connus pour leurs films horrifiques, une direction logique qui devait probablement se ressentir dans le pilot et le premier projet de série, mais qui a du être revu pour Netflix qui, au final, propose un format beaucoup plus teenager… mais pas déplaisant

En effet, la série va reprendre les grandes lignes de comics en se centrant sur sa fratrie adolescente brutalement devenus orpheline de père, alors qu’ils arrivent dans leur nouvelle demeure. Du jeune Bode qui découvre les clés jusqu’à ces dernières, la série garde une cohérence certaine en toile de fond, avant de s’émanciper sur le portrait de ses personnages et le cadre général. Dans l’ombre d’un Stranger Things, Sex Education ou autre teen séries nées sur Netflix, Locke & Key propose une ambiance certes mystérieuse mais relativement légère et façonnée par les interactions entre les personnages, leurs nouveaux camarades et des romances naissantes. Ayant fini les comics juste avant de démarrer la série, j’ai eu du mal à me faire à cette vision plus édulcorée et transformée, tandis qu’objectivement, l’ensemble souffre d’une installation longuette qui vire parfois au téléfilm.
Le bon coté d’avoir pris des distances avec le format papier, c’est qu’on évite que le moindre écart soit fatal. Souvenez-vous des débuts de la série The Walking Dead qui adaptait presque à la lettre les comics : c’était dans ses quelques différences (pourtant minimes finalement) que l’adaptation prenait des risques (la création de Daryl, le changement de caractère d’Andrea, l’absence de Tyreese…). Du coup, quand la série s’est enfin émancipée de son support papier, c’est là que tout a foiré – selon moi.
Ici, les différences pourraient jouer en la faveur de ceux qui ont déjà lu les comics puisque Locke & Key revisite l’histoire – à minima les deux premiers tomes – mais en osant des sorties de routes et des twists inédits. De même, les comics étant très denses, il m’est arrivée plusieurs fois de revenir en arrière pour relire ce qui m’avait échappé, ce que la série évite en décomplexifiant son intrigue – quitte, parfois, à la rendre trop soft. Pour ceux qui n’ont pas lu les comics, Locke & Key séduira les amateurs de séries fantastico-adolescentes, quelque part entre Stranger Things et Riverdale.

Car oui, si la série est plutôt solaire et adolescente, coté bouquin on est sur une autre tonalité. Attention aux spoilers à partir d’ici !
Locke & Key démarre sur une tragédie un plus violente que ce que montre la série : ce n’est pas un mais deux tueurs qui débarquent chez les Locke, tuent le père, manquant de peu d’assassiner la mère (qui révélera plus tard avoir été agressée sexuellement), alors que Tyler arrive juste à temps pour tuer l’un des assaillants avant battre le second. Arrivée à Lovecraft, la famille est totalement ébranlée : si le jeune Bode reste un enfant plutôt joyeux et curieux (découvrant ainsi la majorité des clés de Keyhouse et la créature du puits), autour de lui c’est la débandade.
Veuve et traumatisée par l’agression, la mère a sombré dans l’alcool et n’essaye même plus de s’occuper de ses enfants alors livrés à eux-même : l’aîné Tyler rumine des pensées sombres entre le fait d’être arrivé trop tard et celui de se sentir coupable du meurtre de son père, tandis que la sœur, Kinsey, est un poil dépressive – on ne peut pas lui en vouloir – et reste crispée par la peur. Autant dire que le tableau n’est pas joyeux. Ajoutons à cela un emménagement qui va se compliquer avec la découverte de nouveau camarades de lycée bien moins pétillants ou clichés que dans la série, notamment les nouveaux amis de Kinsey qui sont plus ou moins marginaux, ou encore le love interest au caractère rebelle de Tyler, sans oublier l’oncle gay qui sera victime d’homophobie croisée avec une tentative de meurtre… ! C’est simple, au-delà des clés, les Locke ont déjà un paquet de problèmes à gérer.
Les personnages évoluent ainsi dans un environnement empreint par un danger permanent, car les attaques surviennent rapidement dès la découverte de la première clé – ce qui change du coté contemplatif de la série Netflix qui n’a abordé qu’une parcelle minime de l’intrigue. Sans trop en dévoiler, je pense que la série se base grosso modo sur les deux premiers tomes, mais les comics vont plus loin que les guéguerres de lycée : de nombreuses clés importantes sont encore à découvrir, ainsi que le passé lycéen du feu patriarche, l’origine des clés, les secrets de l’entourage adulte de la série et, évidemment, la fameuse Porte Noire… dans un ensemble qui cultive à merveille les oppositions lumineuses et noires de la magie.

*** En résumé ***

Les + de la série vs les + des comics :

  • Plus accessible et adolescente, la série Locke & Key conserve le mystère et l’intérêt autour des clés.
  • Dans sa version papier, Locke & Key est plus sombre et plus dense, tandis que le dessin permet d’explorer un imaginaire sans limite. Chaque tome propose des rebondissements solides qui donnent envie de dévorer la suite. Les personnages sont abordés intelligemment : ce ne sont pas des modèles, au contraire, Locke & Key a un petit penchant pour les marginaux qui sortent du moule social attendu. L’histoire ne recule pas devant la colère, la mort ni le danger, mettant souvent ses personnage en danger.

Les – de la série vs les – des comics :

  • La série est souvent contemplative car elle demande pas mal d’installation, tandis que le manque de budget se fait parfois sentir sur les décors et les effets spéciaux. En effet, si l’utilisation de la clé de la tête ou encore de la clé fantôme sont acceptables, la différence avec la version papier est visible. Le non-respect de certains personnages est parfois dérangeant, notamment le love interest de Tyler et les nouveaux amis de Kinsey qui n’ont rien à voir avec leurs versions papier. Et j’ai bien peur que la présence (même rapide) d’un certain personnage ne reflète l’intention des scénaristes de changer l’histoire générale…
  • En comics, il faut se faire au style de dessin un peu brut et… c’est à peu près tout puisque les comics sont tout simplement géniaux.

La bonne nouvelle, c’est que la saison 2 a été commandée, donc vous avez tout le temps de dévorer les comics avant de reprendre la série, car les deux peuvent se suivre indépendamment (pour l’instant).

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