
Le pitch : Héros malgré lui, Mickey Barnes se tue à la tâche… littéralement ! Car c’est ce qu’exige de lui son entreprise : mourir régulièrement pour gagner sa vie.
6 ans après le succès planétaire du film Parasite, souligné entre autres par une Palme d’Or au Festival de Cannes, 1 Golden Globe, 1 César, 1 Bafta et 4 Oscar, le réalisateur sud-coréen Bong Joon-ho (Memories of Murder, The Host, Snowpiercer, Okja, Parasite…) revient avec un nouveau film Mickey 17, en adaptant le roman Mickey7 d’Edward Ashton. Porté par une ambition SF, Mickey 17 se projette dans un futur dystopique où l’humanité a bien avancé dans sa conquête de l’espace et sur la science expérimentale, introduisant ainsi le concept des Remplaçables, des être vivants synthétiques qui pourront servir de cobayes au cours d’explorations spatiales et d’expérimentations variées.

Très rapidement, le film de Bong Joon-ho met en exergue un parallèle entre les avancées de la science et la déshumanisation dont fait l’objet son héros, que l’on voit mourir seize fois à l’écran. Alors que Mickey 17 nous attache à son personnage central, je n’ai pu m’empêcher de penser au premier Robocop (de Paul Verhoeven, 1987) où, de la même façon, les scientifiques agissaient avec un désintérêt total pour la vie humaine qui étaient à leur merci. Car c’est bien là le cœur du récit : si Mickey en est à sa dix-septième itération, il conserve également tous ses souvenirs depuis sa version originale. Par conséquent, j’ai été vite prise d’empathie pour ce personnage à l’histoire quelconque, un peu lâche et à un peu à la marge qui, plutôt que de mûrir a choisi une forme de fuite assez extrême.

D’une amitié décevante à une relation passionnelle, en passant par un double à la personnalité un poil plus tranchée, Mickey 17 explore un échantillon d’humanité à la loupe, sous la houlette d’un simili-Trump de l’espace (Mark Ruffalo). À la fois drôle et piquante, la première partie du film ressemble à une fable SF, mêlant humour et fantastique, tout en traversant des sujets plutôt lourds. Derrière son pendant optimiste, Mickey 17 fait l’effet d’un clown triste, tant le film amuse mais ne minimise jamais la cruauté ambiante. Autour du personnage central, Boon Joon-ho questionne finalement le clonage, mais également le genre de société qui permettrait cette pratique et, surtout, la vie de ces Remplaçants ont-elles autant de valeur que celle des modèles originaux ?

Malheureusement, une fois le tableau posé à travers une première partie qui fait office d’installation, guidé par une narration en voix off permanente, Mickey 17 tente de prendre son envol et change de braquet en cours de route. Parmi toutes ses sous-intrigues, Boon Joon-ho choisit soudainement de se focaliser sur un autre sujet, ce qui est assez ironique puisque la majeure partie du film traite les copies précédentes de Mickey 17 comme un kleenex. Pour ceux qui auront vu Okja, une nette sensation de déjà-vu émane de la seconde partie du film, alors que Boon Joon-ho tente tardivement de relancer son récit. J’ai eu du mal à garder les yeux ouverts jusqu’à la fin tant l’ensemble perd en dynamisme et file, lentement mais sûrement, vers une conclusion certes satisfaisante, mais tout de même prévisible.

Si vous espériez de nouveau vous retrouver sur le cul comme après avoir vu Parasite, rappelez-vous (ou apprenez) que Boon Joon-ho a toujours eu un cinéma plutôt optimiste, cherchant à faire briller les valeurs humaines aux confins des cadres les plus sombres – en torpillant souvent les riches au passage. Mickey 17 donne l’impression d’être un condensé de ses thématiques favorites et des clins d’œil à ses précédents films (Okja, Snowpiercer, The Host…), destiné aux amateurs de son style, là où, pour ma part, j’aurai préféré être un peu plus surprise et conquise.

La bonne nouvelle, c’est que Mickey 17 est porté par un cinéaste talentueux. Il parvient donc à créer un univers solide où les décors glacé et l’atmosphère aride sont le miroir constant de la société qu’il dépeint. Toujours précis et soigné, Boon Joon-ho revisite les codes de la science-fiction et évite brillamment de remâcher une photographie lisse et impersonnelle dont certains usent et abusent en tout impunité (hello Denis Villeneuve). C’est souvent brillant, généreux et touchant, malgré ses failles scénaristiques Mickey 17 possède tout de même de gros points forts.

Et un de ses points forts, c’est son casting absolument génial : Robert Pattinson (The Batman, Tenet, The Lighthouse…) surprend et émeut dans un rôle multiple qu’il interprète à merveille – faisant presque oublier qu’il est “vengeance” à ses heures perdues. Autour de lui, Mark Ruffalo (Pauvres Créatures, Adam à Travers le Temps, Avengers – Endgame…) est excellent dans un rôle qui – à mon avis – n’est pas si innocent (*wink wink*), épaulé par une Toni Collette (Juré n°2, Nightmare Alley, Le Passager n°4…) géniale. On retrouve également Steven Yeun (Acharnés, Nope…) et Naomi Ackie (Blink Twice, Master of None…) qui s’oppose diamétralement autour du héros, tandis qu’Anamaria Vartolomei (Le Comte de Monte-Cristo, L’Évènement…) s’ajoute à la fête.
En conclusion, Mickey 17 est un trip SF fascinant mais tout de même bancal, porté par la patte unique de Bong Joon-ho et un casting en or. S’il ne révolutionne pas le genre, il confirme néanmoins le talent du cinéaste pour raconter l’humain au cœur du chaos. À voir.

