Action, Comédie

[CRITIQUE] Novocaïne, de Dan Berk et Robert Olsen

Le pitch : Lorsque la fille de ses rêves est kidnappée, Nate, un homme ordinaire, transforme son incapacité à ressentir la douleur en une force inattendue dans son combat pour la retrouver.

À force de vouloir transformer chaque quidam en super-héros de fortune, le cinéma d’action contemporain semble oublier que le spectaculaire ne suffit pas à faire un film. Réalisé à quatre mains par Dan Berk et Robert Olsen (Significant Other, Villains…), Novocaïne en est l’exemple parfait : un high concept creux déguisé en divertissement nerveux, qui confond vitesse avec intensité, et pose avec propos.

Sur le papier, l’idée de bâtir un film autour d’un protagoniste insensible à la douleur aurait pu donner lieu à une relecture originale au genre action. Mais ici, cette caractéristique devient surtout un gimmick scénaristique, usé jusqu’à la corde dès le premier acte, au point de rendre chaque scène d’action  invraisemblable. Le héros encaisse coups, balles, explosions et autres traumatismes corporels avec le stoïcisme d’un cascadeur sous morphine… sans que personne ne s’interroge vraiment sur les conséquences biologiques évidentes : fractures, hémorragies, infections – tout est balayé sous le tapis au nom du fun.

Ça aurait peut-être pu marcher avec un minimum d’idées. Le duo Berk et Olsen aligne les clichés, on empile les bastons graphiques comme un jeu vidéo mal écrit, en faisant tout pour que le personnage central morfle à l’écran pour faire grimacer dans la salle. Malheureusement, à cause du manque de surprise du scénario, Novocaïne ne parvient pas à nous attacher à ce pseudo-héros en mal d’amour qui tente de sauver sa belle. On dirait un vieux fantasme super-héroique  à peine assumer à la mise en scène faussement frénétique pour donner une impression de dynamisme. On sent l’inspiration du côté des Hypertension, Baby Driver, Kick-Ass ou autres Deadpool, mais sans la folie créative ni la conscience méta qui faisaient le sel de ces références. Même la violence, censée être jouissive, finit par lasser, tant elle semble gratuite, désincarnée, presque gênante de vacuité.

Ce qui aurait pu être un petit plaisir coupable vire donc rapidement au film kleenex : sans texture, sans enjeu, sans mémoire… Novocaïne n’a finalement que très peu d’intérêt. Cela fera surement son petit effet aux lycéens au fond de la salle et aux ados tardifs, mais en réalité, le cinéma d’action n’a pas vraiment besoin de ce virage adulescent compulsif. Ces dernières années nous ont offert une revisite honorable du genre, que ce soit par le style (de The Raid à John Wick), l’ironie mesurée (Nobody, Bullet Train…) ou le buddy/family movie à la sauce plus ou moins vengeresse (Fast and Furious…) – le tout à l’ombre de classique comme les Mission Impossible. Bref, inutile de vulgariser l’action, merci !

Ajoutons à cela un casting sans relief, dominé par des nepo babies (fils ou fille d’acteurs ou autres personnalités du cinéma) qui confondent désinvolture et charisme, et vous obtenez un objet filmique sans âme, qui mime le cool sans jamais le maîtriser. Jack Quaid (Companion, Oppenheimer, Scream…) enchaine les seconds rôles même quand il joue les leads, tandis à qu’à ses cotés Amber Midthunder (Dream Scenario, Prey, Comancheria…) et Ray Nicholson (Promising Young Woman, Licorice Pizza, Smile 2…) tentent vaguement de donner du corps au film.
À noter, la présence de Jacob Batalon (Les Cartes du Mal, Spider-Man : No Way Home…) qui reste, encore une fois, “the guy in the chair”.

En conclusion, Novocaïne ressemble plus à un concept qu’à un film abouti. Dan Berk et Robert Olsen se réfugie derrière un prétexte bidon pour appâter la galerie mais une fois l’effet anesthésiant dissipé, il ne reste qu’une heure trente de poudre aux yeux. À éviter.

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