Thriller

[CRITIQUE] Hypnotic, de Robert Rodriguez

Le pitch : Déterminé à retrouver sa fille, le détective Danny Rourke enquête sur une série de braquages qui pourraient être liés à sa disparition. Mais les criminels qu’il poursuit sont bien plus machiavéliques qu’il ne l’imaginait : ils hypnotisent des innocents pour qu’ils commettent des crimes contre leur volonté. Personne ne semble à l’abri. Pour les déjouer, Rourke va devoir se méfier de tout le monde…

4 ans après Alita: Battle Angel, Robert Rodriguez (Spy Kids, Machete Kills, Le Livre de Boba Fett…) revient dans les salles obscures avec Hypnotic, un simili-thriller d’action bricolé en famille avec son fille Rhiannon aux storyboarding, ses trois fils, Rocket, Rogue et Rebel, au montage, à la bande-original et aux effets spéciaux. Rien d’étonnant, puisqu’en plus de ses nombreuses collaborations avec Quentin Tarantino (Une Nuit en Enfer…) et Frank Miller (Sin City et sa suite…), le réalisateur avait déjà utilisé le scénario écrit par son fils à l’époque agé de 7 ans pour réaliser le film Les Aventures de Shark Boy et Lava Girl. Le flambeau se transmet ainsi, mais je ne peux m’empêcher de penser que, j’aurais peut-être passé un moment plus agréable devant Hypnotic si l’histoire avait également été écrite par un enfant !

Robert Rodriguez prétend avoir puisé son inspiration dans le chef-d’œuvre hitchcockien Sueurs Froides (1958). Cependant, en réalité, Hypnotic penche davantage vers un amalgame sans originalité, mélangeant les éléments du roman de Stephen King, Charlie (récemment adapté avec mollesse dans Firestarter), le film de Christopher Nolan, Inception (2010) et une touche de Shutter Island de Martin Scorsese (2010).

L’ensemble aurait été plus sympathique s’il avait osé une transition franche vers la science-fiction pour explorer le thème des super-pouvoirs, au lieu de confondre maladroitement l’hypnose et le contrôle mental digne des personnages issus des X-Men ! À partir d’une histoire floue d’enlèvement, Hypnotic suit le parcours d’un père policier qui, au détour d’un braquage de banque, va retrouver la piste de sa fille disparue. Le film va alors tricoter une intrigue nébuleuse et sans âme autour de personnages ayant le pouvoir de contrôler l’esprit des gens à partir de simples phrases ou de battles de regard. Il s’embourbe progressivement vers une résolution qui va non seulement contredire tout le postulat de départ (si tout le monde est dans le coup, y a-t-il vraiment contrôle de l’esprit ?), pour finalement aboutir à une conclusion dépourvue d’intérêt.

Plus le film avance et plus Hypnotic s’égare dans une série de rebondissements prévisibles, alors que ses personnages semblent être des automates dont les piles sont sur la fin de la réserve. Ronflant et ennuyeux à mourir, le film de Robert Rodriguez patauge dans son manque d’identité et d’originalité. Impossible de ne pas penser à Inception, ses rêves imbriqués et ses paysages qui se referment tandis que le film tente d’illustrer ses fameuses constructions hypnotiques pour tenter de nous embarquer dans ses nombreux leurres.

Malheureusement, la sauce ne prend jamais. D’abord, ayant déjà fait de l’hypnose (en thérapie ou de spectacle), Hypnotic passe totalement à coté de son concept alors que l’hypnose demande du temps et une certaine mise en condition avant d’être effective. En gros, c’est comme si vous alliez voir un inconnu pour lui dire « tu es un chat » et que la personne se mettait immédiatement à miauler : ça ne marche pas comme ça ! Il aurait fallu souligner l’effet pouvoir, ne serait-ce qu’une distorsion visuelle ou auditive à la manière du film Push de Paul McGuigan (2009), par exemple… Mais la direction d’acteurs montre peu d’effort pour nous embarquer et se cantonne à un ton conversationnel banal pour essayer de nous faire croire à ces hypnoses impossibles tout en assénant des théories paresseuses sur de la construction mentale ! On est sûrs que ce n’est pas un enfant qui écrit ce film, finalement ?!

Enfin, le film ne parvient pas à embarquer puisqu’il ne propose que du service minimum à travers une société secrète composée d’une poignée de figurants qui s’agitent dans des décors qui font l’effet d’un hangar aménagé. La crédibilité du film navigue allègrement sous le niveau zéro et les objectifs des antagonistes sont complètement survolés. Du coup, je n’ai jamais réussi à m’intéresser au sort des personnages et Hypnotic était bien trop concentré à jouer la carte de l’esbroufe (ratée) pour raccrocher les wagons. Bref, une jolie perte de temps et un échec au box office américain bien compréhensible.

Au casting, c’est le festival du charisme en berne : Ben Affleck (Air, Eaux Profondes, Le Dernier Duel…) ne va pas bien et ça se voit tant il est en pilote automatique. Si David Fincher (Gone Girl…) et Ridley Scott avait su capitaliser sur son coté apathique et que sa version de Batman ne nécessitait pas vraiment d’acting très poussé, quand il doit incarner des personnages plus construits et bavard, l’acteur ne parvient plus à donner le change. À ses cotés, Alice Braga (The Suicide Squad, Les Nouveaux Mutants, Queen of South…) tente une énième incursion à Hollywood qui foire à nouveau, avec un personnage qui s’agite beaucoup et en vain. Face à heux, William Fichtner (Independence Day : Resurgence, Horse Soldiers, Mom…) joue les méchants vraiment méchants qui se contentent surtout de regarder les autres avec un regard vide – pardon – méchant. Mouais. Si même le casting fait pas d’effort…

En conclusion, c’est bien joli de faire travailler la famille, mais si c’est pour nous refourguer un film aussi mollasson et sans intérêt, je pouvais m’en passer. Hypnotic finira certainement dans des oubliettes bien méritées tant le film déçoit plus qu’il n’hypnotise. À éviter.

PS : une scène bonus dans le générique à l’audace de suggérer une suite…

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