Le pitch : Après avoir retrouvé foi en l’humanité, Bruce Wayne, inspiré par l’altruisme de Superman, sollicite l’aide de sa nouvelle alliée, Diana Prince, pour affronter un ennemi plus redoutable que jamais. Ensemble, Batman et Wonder Woman ne tardent pas à recruter une équipe de méta-humains pour faire face à cette menace inédite. Pourtant, malgré la force que représente cette ligue de héros sans précédent – Batman, Wonder Woman, Aquaman, Cyborg et The Flash –, il est peut-être déjà trop tard pour sauver la planète d’une attaque apocalyptique…
Prochainement disponible sur OCS
Avec Ben Affleck, Gal Gadot, Henry Cavill, Ray Fisher, Ezra Miller, Jason Momoa…
*** Spoilers inclus (sans description détaillée) ***
4 ans après la déception qu’était Justice League et après une campagne intensive des fans pour avoir le fameux Snyder Cut, il est enfin là, tout fringuant, disponible pour les voyageurs anonymes qui ont fait un tour chez l’oncle Sam depuis jeudi dernier et bientôt sur OCS en exclusivité pour les plus patients.
Le chemin a été long et a causé pas mal de dégâts, notamment la dissolution du DCEU après l’échec de Justice League version Warner-Whedon, rendant orphelins les autres films DC (Wonder Woman, Shazam, Aquaman…) et laissant les projets suivants à l’état embryonnaire (Flash, Cyborg…). Que s’est-il passé ? Pour la faire courte : Zack Snyder a du abandonner la V1 de Justice League suite au décès tragique de sa fille. Warner Bros prend alors la décision de trouver un remplaçant pour finaliser le film, pour ne pas rater le coche face au mastodonte Marvel qui terminait 2017 avec Thor – Ragnarok et arrivait l’année suivante (Avengers – Infinity War). Entre en scène Joss Whedon, alors en froid avec Marvel Studios, et les boss de Warner Bros qui décident de mettre leurs grains de sel dans ce qu’avait entamé Zack Snyder et de… tout saccager. Adieu toute la réflexion autour de la mythologie et les motivations des super-héros du point de vue humain qui avait commencé avec Man of Steel puis Batman V Superman, place à un film de super-héros sans âme, tronqué dans ses intentions et surtout modelé sur un cahier des charges marvelisés qui ne correspond absolument pas au modèle DC version Snyder. Ajoutons à cela des reshoots catastrophiques qui donneront naissance au moustachegate, pour les dégâts les plus visibles, même si les plus aguerris noteront que Gal Gadot, par exemple, n’est pas toujours elle-même selon les plans… Bref : La Justice League de 2017 n’en avait que le nom et nous, les fans, on en avait gros sur la patate.
Et puis voilà, quelques années et des millions de dollars plus tard (ainsi qu’un petit scandale à la clé), Zack Snyder a repris le tournage de Justice League, au coté de co-stars plus que motivées à donner une seconde vie au film. D’abord annoncé comme une série de 4 mini-films pour la fin de l’année, Justice League Snyder Cut est finalement disponible en un gros film de 4h à voir d’une traite (mais aussi découpé en chapitres si vous manquez de temps).
A l’arrivée, que vaut ce Snyder Cut ? Et bien comme le Snyder Cut précédent (celui pour Batman V Superman avec ses 30 minutes supplémentaires – qu’il est nécessaire d’avoir vu avant, d’ailleurs, pour mieux comprendre comment Steppenwolf est arrivé), il est bien mieux que la version cinéma. Voir même au-delà : autant dire qu’en 4h, on a largement le temps d’explorer les tenants et les aboutissants de nos héros. Justice League Snyder Cut prend le temps d’installer et de construire un décor, ses personnages et les enjeux du films sans laisser personne sur le carreau. Batman est plus présent, le parcours de Cyborg est bien mieux traité et Flash n’est plus seulement l’adulescent rigolo de la bande. Zack Snyder ré-imprime sa tonalité sombre, pas uniquement sur la photographie (on y reviendra), mais sur ce monde désespéré qui a perdu son super-héros iconique, à savoir Superman.
Il est important tout de même de noter que le film n’a pas entièrement été réécrit : il conserve la même trame principale et les reshoots servent à combler ou à revoir ce qui a été fait pour le premier film. Par conséquent, Justice League Snyder Cut a toujours cet effet de huis-clos dans le sens où les humains lambdas semblent totalement absents, alors que le monde est sur le point d’être envahi. Mais heureusement, quand il s’agit de corriger et de recentrer le film, Zack Snyder vire toutes les idées farfelues alors imposées par Warner et Whedon : donc pas de famille russe à sauver, moins de blagues de cours de récrés ni de concours de b*tes et surtout, la présence de Lois Lane n’est plus le « plan de secours » de Batman (ce qui était quand même risible dans la version originale). De la même façon, les enjeux et les motivations du méchant Steppenwolf sont bien mieux expliqués, ce qui le rend bien plus crédible.
Au bout de 3 heures d’installation, d’introduction et de mise en place, Justice League Snyder Cut ne déçoit pas quand il s’agit de livrer sa battle finale et sa conclusion. Tout ce qui manquait au film original est corrigé ici : les scènes d’action mettent en scène les héros en solo et puis surtout ensemble, on a enfin la Justice League en action – et non une bagarre informe avant que Superman arrive pour sauver tout le monde. Non, cette fois, tous les héros brillent séparément et ensemble, tandis que (Black) Superman fait office de cerise sur le gâteau.
Ce qui est aussi conquérant, c’est que Justice League Snyder Cut donne envie de faire revivre le DCEU : déjà parce que Flash est bien plus prometteur et convaincant dans cette version (et pas qu’un peu !), parce que Cyborg est encore plus alléchant, parce que le look de Steppenwolf a quand même plus de gueule… mais aussi parce que le film tease les ambitions de Darkseid (la fameuse équation Anti-vie) et continue de nous faire baver devant la possibilité d’un futur « Injustice ». De quoi occuper les studios et les salles de cinéma pendant quelques années – si les têtes pensantes chez Warner Bros arrêtent d’entraver le travail des autres !
Visuellement, Zack Snyder signe son filtre habituel aux couleurs métalliques et désaturés, traversés par des éclats de couleurs quand les super-pouvoirs entrent en action. Oublions donc le final orange vif : Justice League Snyder Cut brille par son filtre bleuté, plus adapté à son ambiance atmosphérique. L’ensemble est sobre, souvent élégant et emphatique quand il s’agit de mettre en lumière les héros du film. Mais je dois dire qu’après Wonder Woman, Shazam et Aquaman qui étaient bien plus lumineux, ce n’était pas entièrement satisfaisant, d’autant plus qu’entre le matériau d’origine et les reshoots, la photo est souvent aléatoire et masque parfois des repères nécessaires à la lecture de l’image donnant parfois l’impression d’être quasiment en noir et blanc. On est donc loin de la beauté léchée d’un 300 ou du régal qu’était Man of Steel, et c’est un peu dommage, car coté effets spéciaux, là encore Justice League Snyder Cut botte encore en touche : fonds verts omniprésents et mauvaise gestion colorimétrique, le film déborde souvent dans tous les sens, rendant certaines scènes d’actions illisibles et le numérique trop visible.
Et puis pour continuer sur les bémols : difficile d’ignorer la durée du film. En l’état, cette version de Justice League n’aurait jamais pu arriver en salles. Même si l’ensemble du film est satisfaisant, Zack Snyder se fait plaisir sur ses tableaux et multiplie les effets de ralentis, notamment sur la première heure voire la première moitié du film. Je pense sincèrement que sans ses ralentis, le film aurait pu nous épargner une heure, d’autant plus que tous les ralentis ne sont pas nécessairement utiles ni même plaisant à voir (gros plans au ralenti et surtout l’insert d’une saucisse à hot dog en plein meet-cute, c’est un grand NON). Mais une fois la machine lançée, il n’y a plus qu’à se laisser porter, non ?
Et bien pas vraiment. L’excès de confiance de Snyder explose et le réalisateur ne se maîtrise plus aussi bien, montrant ce dont il est capable lorsqu’il est en roue libre… Et ce n’est pas que du positif ! Car aux ralentis, il faut ajouter des intentions mystiques au début du film qui ne fonctionnent pas toujours (les chants islandais, la musique et la chanteuse à chaque fois que Wonder Woman respire à l’écran), la bande-originale revue par Junkie XL à la place de Danny Elfman, les chants (oui encore les chants)… Un trop plein d’énergie qui laisse dubitatif et pour ma part, je regrette quand même la scène d’introduction de Batman et la musique d’ouverture du film original avec la chanson « Everybody Knows » de Sigrid.
De même, Snyder semble parfois oublier que ses personnages sont des super-héros en cours de route et parvient décrédibiliser certaines des scènes d’origines (notamment celle du tunnel où les persos semblent oublier qu’ils ont des super pouvoirs avant leur confrontation face à Steppenwolf…), tandis que Justice League Snyder Cut s’aborde sans pression une partie de l’intrigue principal du film Aquaman (qui passe une partie du film à essayer de trouver le trident perdu du roi Atlan, pour rappel) !
Je pourrais chipoter sur pas mal de choses : les tentatives persistantes de ressembler à du Marvel (résidus du premier film… quoique…), j’ai encore d’autres choses à dire sur les couleurs trop sombres du film, la chanteuse de Wonder Woman ou encore l’absence de mythologie… mais globalement, pourquoi se fâcher ? Justice League Snyder Cut est une bien meilleure version, beaucoup plus complète que la version cinéma, et vaut le détour, ne serait-ce que pour anéantir le goût amer laisser par l’autre film, mais aussi pour fantasmer sur les nombreuses possibilités créées par cette nouvelle version, qui teasent des personnages nouveaux dans un potentiel DCEU 2.0 (Ryan « ATOM » Choi, Martian Manhunter incarné par Henry Lennix – enfin confirmé !…). De plus, Zack Snyder introduit proprement Darkseid, revient sur la fameuse scène post-générique de la version cinéma avec son invité surprise (Deathstroke) et va même plus loin, permettant alors de réhabilité un certain Jared Leto dans le rôle du Joker – moins ronronnant et beaucoup plus dérangé.
En conclusion : oui, c’était long, oui c’était 4h, oui c’est imparfait, oui c’était en 4:3 (à la base, Snyder espérait encore une sortie en salles et en IMAX)… et pourtant, c’est sans aucun regret. Zack Snyder tient ses promesses, se lâche un peu, beaucoup et passionnément pour nous livrer une Justice League digne de ce nom.
Maintenant la question ultime… si on devait se replacer dans le temps, à l’époque où Justice League est sorti et le remplacer par le Snyder Cut, est-ce le meilleur film du DCEU ? : je ne pense pas. Zack Snyder ne fait « que » réparer les pots cassés, mais le récit ne reprend pas les théories sur les super-héros « divins » – alors que c’était l’essence même du DCEU et sa grosse différence avec les produits Marvel. Dans cette logique, Man of Steel reste encore en tête.
PS 1 : Pas de scène post générique, pas d’article spoiler tant qu’il n’y a pas de vision du DCEU.
PS 2 : On pourrait avoir le Snyder Cut de Wonder Woman 1984 maintenant ? 😀