Épouvante-horreur

[CRITIQUE] Les Guetteurs, d’Ishana Night Shyamalan

Le pitch : Perdue dans une forêt, Mina trouve refuge dans une maison déjà occupée par trois personnes. Elle va alors découvrir les règles de ce lieu très secret : chaque nuit, les habitants doivent se laisser observer par les mystérieux occupants de cette forêt. Ils ne peuvent pas les voir, mais eux regardent tout.

Il n’est pas rare que la progéniture de réalisateurs fassent également un essai (ou plusieurs) derrière la caméra. Ce n’est pas surprenant non plus lorsque dans leurs premiers films on y retrouve les mêmes marqueurs cinéphiles qui ont fait le succès de leurs parents (ou grands-parents, oncles, peu importe…). Parfois, cela donne lieu à de bonnes surprises et révélations : Brandon Cronenberg avec Antiviral ; Bryce Dallas Howard au petit écran avec des épisodes de The Mandalorian et Le Livre de Boba Fett ; Jason Reitman qui a créé sa propre filmographie avec notamment Juno, avant de réaliser SOS Fantômes – L’Héritage ; Sam Levinson qui a fait des merveilles avec Euphoria ou encore, bien sûr, Sofia Coppola qu’on ne présente plus.
Pour le meilleur ou pour le pire, ces “nepo-babies” sont férocement jugés – puisqu’évidemment pistonnés  – dès leurs premiers pas derrière la caméra. On excuse souvent les similitudes d’un premier film ou les gimmicks familiers, car on ne peut pas leur reprocher de s’être inspiré par le travail de leurs ascendants. Après tout, tous les cinéastes (et artistes en général) s’inspirent de leurs idoles avant de se façonner leur propre patte, n’est-ce pas.

Par contre, ce qui est étonnant/intéressant/décevant chez Ishana Night Shyamalan, c’est qu’elle ait choisi de s’inspirer de la période creuse de son paternel ! Les Guetteurs ressemble à l’adaptation des brouillons ratés des films Le Village et La Jeune Fille de l’Eau qui auraient été récupérés au fond d’une poubelle. Et comme tout paternel qui se respecte, M. Night Shyamalan produit le bébé de son bébé (normal, puisqu’il produit déjà ses propres films), probablement avec un regard ému devant un film qui ressemble autant à ses œuvres les plus contemplatives et paresseuses de sa carrière.

Alors que le père s’est rattrapé avec ses derniers films, depuis The Visit jusqu’à Knock At The Cabin, en passant par Split ou encore Old, je n’avais pas besoin qu’on me rappelle ces heures sombres dans les salles obscures où je comptais les minutes devant La Fille de l’Eau ou encore *gasp* Phénomènes et After Earth. Ce dont le cinéma horrifique n’avait pas besoin, c’est un enième pamphlet vaseux sur une vague intrigue superficielle et super-contemplative où il ne se passe rien pendant plus d’une heure.

Passé une introduction affreusement classique cherchant à ficher la trouille (raté), Les Guetteurs tente de nous intéresser à son héroïne américaine, expatriée en Irlande, qui se retrouve perdue dans une forêt. Soyons clairs : je suis une Milleniale qui a grandi aux abords d’une forêt en regardant X-Files sur M6 et qui consomme du films d’horreur de tous poils dès que je m’ennuie un peu. Autant vous dire qu’il m’en faut plus que des plans lancinants sur des arbres et des bruits de craquements la nuit pour me faire flipper ! Malheureusement, une fois arrivé dans la maison, face à ces Guetteurs invisibles, le film tourne en rond en s’observant littéralement le nombril face à miroir, ponctuant ses séances de contemplations à des balades dans bois quand il fait jour et un grossier parallèle à Big Brother la nuit. Shyamalan ou l’art d’utiliser des symboles de la manière la plus poussive qui soit…

Il faudra attendre une bonne heure de vide avant que le film d’Ishana Night Shyamalan finisse par dévoiler le véritable sujet de son intrigue, mais là encore… déception. Des fées (pas celles de Disney, hin, celles qui sont cheloues, comme les banshees par exemple…) ? Dans une forêt irlandaise ? Give Me A Break… Même le frenchy Brocéliande en avait plus sous la serpe que ce navet balbutiant qui recopie mollement des artifices médiocres sous prétexte d’un vague essai de tension. Si les trop nombreux found-footage (incluant la franchise Paranormal Activity) nous ont bien appris quelque chose, c’est qu’il ne suffit pas de poser une caméra quelque part en attendant que ça bouge dans un coin pour créer du frisson.

Le pire, c’est qu’au-delà de réaliser une pâle redite des films ratés de son père, Ishana Night Shyamalan ne fait pas non plus d’effort ni sur la mise en scène ni l’aspect esthétique de son film. Encore une fois, filmer une forêt de nuit comme de jour ne suffit pas (à moins d’être un citadin pur jus que le moindre brin d’herbe émoustille). Les Guetteurs n’a aucun souffle et ne parvient jamais à soulever une quelconque empathie pour ses personnages. L’ensemble est léthargique et amorphe, tandis que les rares effets spéciaux sont si pathétiques et mal faits qu’on dirait le travail d’un débutant sur Midjourney (IA). Et quitte à être bien poussif dans son propos, autant baigner le tout dans une photographie bien jaune nauséeux pour bien appuyer le malaise général. Comme c’est original…

Bref, on s’ennuie effroyablement, en voguant dans une narration dont l’issue n’a ni-queue ni-tête, comme si la disparition de ces personnages dans leurs vies de tous les jours n’avait eu aucun impact. La conclusion est ampoulée de ressorts commodes pour boucler le film, mais arrivée à ce stade, j’avais depuis longtemps perdu tout intérêt pour cet exercice brouillon, illogique et tout simplement navrant.
Et pourtant, ce n’est pas étonnant. Après tout, Ishana Night Shyamalan a brillamment suivi les traces de son père en proposant un trailer alléchant pour finalement servir du vide*.

Au casting, la rare Dakota Fanning (Equalizer 3, Once Upon A Time… In Hollywood, Ocean’s 8…) tient le rôle principal. Difficile de se souvenir qu’elle était une enfant actrice pleine de promesse (avant que sa soeur ne la supplante) quand on voit sa prestation sans vie ni relief et cette même expression abrutie qu’elle arbore tout au long du film (voir les photos). Autour d’elle, Olwen Fouéré (The Northman, Les Cartes du Mal…), Georgina Campbell (Barbare, Krypton…), Oliver Finnegan et John Lynch (The Banishing : La Demeure du Mal…) tentent d’animer l’intrigue, en vain.
Et non, pas de caméo de papounet dans ce film.

En conclusion, sommes-nous réellement surpris ? Comme tout pur produit du népotisme produit en famille, c’est nul. À éviter.

* Je ne pardonnerai jamais Phénomènes, After Earth ou encore Le Dernier Maître de l’Air. Jamais, jamais, jamais. Jamais.

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