
Le pitch : Deux ans après les événements du premier film, Gemma est maintenant une autrice mais également une activiste pour la régulation de l’intelligence artificielle. Elle a également fait M3GAN prisonnière d’un petit robot inoffensif afin qu’elle ne puisse plus faire de mal. Néanmoins, la technologie de M3GAN a été volée afin de créer un robot militaire nommé AMELIA. Mais AMELIA commence à réfléchir par elle-même et se retourne contre ses créateurs. Gemma et sa nièce Cady pouvant être les prochaines cibles, elle n’a pas d’autres choix que de faire revenir M3GAN dans un corps amélioré afin de battre AMELIA.
Succès surprise de 2023, M3GAN avait réussi l’exploit de revitaliser le genre des poupées tueuses en y injectant une bonne dose d’IA, d’humour noir et de satire technoïde. Un concept simple et malin, imaginé par Akela Cooper (scénariste sur Malignant, La Nonne 2…) et James Wan (Conjuring, Insidious, Aquaman…), tandis que la mise en scène flirtait savamment avec l’épouvante.
Avec M3GAN 2.0, Gerard Johnstone (Housebound…) rempile mais change clairement de registre. Le piège classique du « succès surprise », c’est qu’il faut ensuite broder une suite à partir d’un concept minimaliste. Parfois, ça marche (John Wick a bâti tout un univers dès le deuxième film), et parfois (souvent), ça déraille — comme The Boy 2, qui renie son idée de base pour sombrer dans un paranormal bancal.

La bonne idée de M3GAN 2.0 (ou plutôt de l’équipe marketing), c’est d’avoir tout de suite assumé ce changement de cap. Exit l’ambiance semi-horrifique du premier volet : cette suite opte pour une tonalité plus musclée, lorgnant ouvertement du côté du techno-thriller dystopique. L’affrontement entre M3GAN et son alter-ego militarisée AM3LIA tire le film vers une dynamique quasi super-héroïque, assumée jusqu’à un certain point. Bref, l’humanité est menacée, et seule M3GAN peut nous sauver. Étonnant comme parti pris, mais pourquoi pas ? C’est toujours plus engageant qu’une redite paresseuse où le robot reviendrait se venger depuis l’ombre.
Ici, M3GAN revient, toujours aussi sarcastique, trouble et déterminée. Elle a gagné en taille (logique puisque l’actrice a également grandi), en punchlines et en présence.

Ce qui maintient M3GAN 2.0 à flot, c’est son énergie et le charisme intact de son héroïne en silicone (ou whatever she’s made of). Destiné à un large public, le film évite l’hémoglobine gratuite pour privilégier la suggestion et l’ironie mordante, misant sur des dialogues acérés et un humour noir bien senti — voire même un peu d’auto-dérision ! Les références super-héroïques sont évidentes : si on peut penser à un Deadpool sage, c’est surtout du côté de Kick-Ass et de sa Hit-Girl que M3GAN semble puiser sa gouaille et sa brutalité. Visuellement, on navigue entre techno-pop et dystopie pompant ses meilleurs idées à la série Black Mirror. Rien de très neuf, mais suffisamment fun et rythmé pour tenir le cap.
De plus, le film fait attention à ne pas oublier ses personnages humains, en forçant parfois un peu trop son concept à travers des pirouettes scénaristiques prévisibles… mais au moins on ne s’ennuie pas. Mention spéciale aux références pop-culture bien placées, qui parleront surtout aux quadras (K2000, Clippy…). C’est pas grand-chose, mais ça fait sourire.

Le souci, c’est que M3GAN 2.0 veut trop en faire, pour être pris au sérieux. À force de vouloir développer un propos sur les dérives de l’IA, la régulation éthique ou la responsabilité des géants de la tech (coucou Apple), le film s’alourdit. Là où le premier allait droit au but, cette suite s’égare dans des tunnels de dialogues explicatifs, des détours narratifs peu utiles, et un suspense étiré. L’antagoniste AM3LIA, d’abord crédible dans ce monde où l’IA gouverne déjà nos vies, est trop vite éclipsée pour remettre M3GAN au centre. Les thématiques, certes pertinentes et bien ancrées dans l’époque (obsolescence, sur-technologisation, impact sur les cerveaux en pleine croissance…), finissent par ralentir la machine. L’intrigue, bardée d’effets de manche, perd en clarté, en intensité et surtout en intérêt en cours de route.

Même la dimension SF, traitée ici via des bricolages de robots qui virent à la magie, sabote un peu l’immersion. On a l’impression que tout est trop compliqué et en même temps trop fastoche pour être crédible. Les scènes d’action, elles, arrivent tard et peinent à compenser le trop-plein de bavardages.
Là où le premier film compensait ses faiblesses par un vrai sens du fun, cette suite s’épuise à vouloir tout dire. À force de jouer au plus malin, M3GAN 2.0 en oublie peu à peu de faire ce qu’on attendait de lui : amuser, surprendre et surtout cogner de la ferraille (ou fendre du sac à viande) ! La promesse d’un duel musclé entre M3GAN et AM3LIA est bien là, mais il faut s’armer de patience, et le résultat reste en deçà des attentes. En voulant ratisser large, le film reste tiède — jamais assez fun, jamais assez dark avec un pied dans la satire, l’autre dans le blockbuster générique. Et pas assez d’épaule pour faire fonctionner le mélange, cette fois.

Côté casting, on prend les mêmes et on recommence : Allison Williams (The Perfection, Get Out, Fellow Travelers…) et Violet McGraw (Thunderbolts*, The Life of Chuck, The Haunting of Hill House…) reprennent du service dans une continuité logique, tandis qu’Amie Donald et Jenna Davis incarnent toujours M3GAN à quatre mains. Surprise : Brian Jordan Alvarez (Tout Est Possible, Special…) et Jen Van Epps (Sans Issue, Don’t Make Me Go…) sont aussi de retour, bien que leurs personnages semblaient out. Leur rôle ? Jouer les techniciens interchangeables, encore une fois.

Parmi les nouveaux venus, on retient surtout Ivanna Sakhno (Ahsoka, Pacific Rim : Uprising, L’Espion Qui M’a Larguée…), convaincante en AM3LIA malgré un traitement narratif qui la relègue trop vite en second plan — dommage. Autour d’elle, des personnages secondaires un peu passe-partout, incarnés par Jermaine Clement (Minecraft, Lego Batman…), Aristotle Athari (Hacks…) et Timm Sharp (Apples Never Fall, On The Verge…).
En conclusion, M3GAN 2.0 est une suite inégale, qui tente d’élargir son univers sans vraiment réussir à en solidifier les fondations. Gerard Johnstone livre un divertissement correct, mais qui aurait sans doute gagné à rester plus resserré, plus mordant… et moins bavard. À voir.

