Le pitch : La vie de Madison Mitchell est perturbée lorsque de terribles visions viennent la hanter. Quelle est cette créature malveillante qui la poursuit et commet ces meurtres atroces ? Une nouvelle histoire originale par James Wan, le maitre de l’horreur.
De Saw à Conjuring, en passant par Insidious, James Wan s’est installé comme le nouveau maître de l’horreur de notre génération et lanceur de franchises bankables – même si pas toujours efficaces une fois qu’il passe la main à d’autres. Même lorsqu’il s’essaye à des genres différents, avec Death Sentence, Fast and Furious 7 ou le récent Aquaman, James Wan a plusieurs fois montré son génie inventif et spectaculaire, que l’on ait aimé l’objet final ou pas. D’ailleurs, dans Aquaman, sa parenthèse horrifique n’est pas passée inaperçue, alors forcément, lorsque le réalisateur annonce son retour aux sources, c’est avec joie (et appréhension) que Malignant est attendu – on en oublierait presque le navet qu’est Dead Silence (qui s’en souvient, d’ailleurs ?).
Avec Malignant, James Wan tente d’ouvrir un nouveau chapitre et s’éloigne des maisons hantées ou autres familles tourmentées dans un exercice de style peu commode où les moments de frissons se conjuguent avec des essais pas toujours heureux. L’affiche du film étant un indice, Malignant veut faire honneur a du cinéma old school (notamment la version US qui est pompé sur un vieux film polonais de 1989), avec de faux airs « suspiriesques » promettant un film en constante rupture avec les codes horrifiques d’aujourd’hui (ou plutôt ceux que James Wan a lui-même installé), surtout sur le traitement de l’image et du son.
À l’arrivée, le résultat est en demi-teinte et c’est dommage, car Malignant est intéressant dans sa forme malgré le fait qu’il se spoile un chouilla dès les premières minutes (faut être attentif et ne pas fermer les yeux). James Wan parvient à ficeler son récit autour de son héroïne aux visions plus que perturbantes et à nous embarquer dans une simili-enquête entrecoupées de meurtres bien graphiques. On y a retrouve l’esthétique nébuleuse de James Wan ainsi que son don pour faire grimper la tension au moment voulu, à travers ses jeux d’ombres et son goût pour le suspens haletant, tout en nous rappelant son appétence pour les imageries gores. Malignant flanque souvent la frousse en titillant nos sempiternelles terreurs nocturnes, ce qui aurait pu être suffisant si le réalisateur ne s’était pas mis en tête d’aller plus loin dans l’exercice de style…
En effet, tout roulerait bien si seulement James Wan n’avait pas voulu trop en faire. Ajouter de l’horreur dans un film de super-héros, pourquoi pas : le passage de la Trench dans Aquaman (dont on attend toujours le spin-off – ou pas) était un petit surprise noire au milieu d’un film extravagant et en roue libre… l’inverse n’est pas évident. Le réalisateur semble s’emmêler les pinceaux coté réalisation et même si j’ai apprécié la qualité de certaines scènes, je ne m’attendais pas à un tel virage blindé de CGI et de bastonnade (certes, plutôt cool) en cours de route qui m’a complètement sorti de l’écrin horrifique de Malignant.
L’autre bémol du film, et ce qui a failli me rebuter d’entrée de jeu d’ailleurs, c’est son univers sonore : du générique tonitruant à une bande-originale trop décalée par rapport aux moments appuyés : Malignant flirte parfois avec le navet rigolard tant il est déroutant dans ses intentions. Si on ajoute à cela des seconds rôles qui semblent avoir trouver leurs talents d’acting dans une pochette surprise, le film perd souvent en crédibilité dans ces scènes voulues plus intenses et qui auraient mieux trouver leur place dans une comédie d’horreur ou un film SF assumé.
À vouloir faire plus compliqué qu’une simple maison hantée ou un jeu crytiquement pervers, James Wan livre un film à la personnalité multiple où chaque aspect semble avoir été réfléchi indépendamment. Le scénario, le montage, la réalisation ou encore la gestion du son, Malignant cumule des mauvais points inattendus et déconcertant, ce qui rend l’expérience générale plutôt laborieuse tant l’ensemble est à la recherche de références au cinéma de genre. J’hésite entre le grotesque ou l’audace pour définir Malignant, mais je pense que la vérité se situe quelque part au milieu, entre un hommage raté à l’ambiance singulière et graphique de Suspiria (l’original) jusqu’à la volonté de sortir des sentiers battus en insérant des scènes d’actions digne d’un passage de Matrix (référence à l’imper en cuir), en passant par de l’horreur graphique et une créature cauchemardesque.
Heureusement, dans son exercice de style un peu schizophrénique, James Wan continue d’avoir recours à certains gimmicks horrifiques plus classiques, qui viennent sauver quelque peu le film, si tant est que le seul objectif du spectateur soit de sursauter un minimum.
Au casting, même si le réalisateur cherche à changer de style, il y a toujours quelques rescapés de son Conjuringverse pour répondre présents, derrière mais aussi devant la caméra avec Annabelle Wallis (La Momie, Peaky Blinders, The Loudest Voice…). Flanquée d’une perruque aussi incongrue que le film, l’actrice vue dans le premier Annabelle tente tant bien que mal de porter le film sur ses épaules. Autour d’elle, Maddie Hasson écarquille les yeux à n’en plus finir et George Young aurait été bien plus crédible si sa partenaire à l’écran, Michole Briana White n’était pas aussi mauvaise. À noter également la présence de McKenna Grace (Captain Marvel, Moi, Tonya…), qui jouait déjà l’enfant Warren dans Annabelle : La Maison du Mal, ou encore Ingrid Bisu (La Nonne, Toni Erdmann…), qui a aussi participé à l’écriture du film, en médecin-légiste gênant.
En conclusion, alors que j’attendais Malignant avec beaucoup (trop) d’impatience, le nouveau film de James Wan livre une tambouille indécise, où l’horreur cohabite avec un trop plein d’idées décousues et mal fagotées. Alors que ses Insidious et autres Conjuring sont quasiment devenus des références du genre horrifiques, Malignant profitera surement du succès de ces films pour attirer les gens en salles, mais risque de faire l’effet d’un accident de parcours que, pour ma part, j’ai vite oublié. À tester.