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[SÉRIE TV] Swarm : 3 bonnes raisons d’être piqué 

Le pitch : La série raconte l’histoire de Dre, une jeune femme obsédée par une pop star, avec une base de fans connue sous le nom de « The Swarm ». La série est une plongée sombre dans la vie de Dre, son fandom et la façon dont il l’emmène dans des endroits sombres et inattendus.

Créée par Janine Nabers et Donald Glover
Avec Dominique Fishback, Chloe Bailey, Nirine S. Brown, ainsi que des apparitions de Rory Culkin, Paris Jackson, Billie Eilish, Kiersey Clemons…
Disponible sur Prime Video

Petite pépite bien trop discrète à mon goût, la nouvelle série showrunnée en partie par l’acteur, chanteur et producteur Donald Glover (ex-Childish Gambino, Atlanta, Le Roi Lion, Spider-Man : Homecoming, Seul Sur Mars…) est une satyre cinglante sur la génération internet, entre déviance et culture américaine. Swarm propose de suivre une jeune femme, fan inconditionnelle d’une artiste pop appelée Ni’Jah, qui va sombrer dans une spirale infernale et destructrice en voulant se rapprocher de son idole.

Évidemment, venant d’un artiste comme Donald Glover, engagé pour la communauté noire, l’exemple de Beyoncé semble être un excellent point d’ancrage pour raconter Swarm (Essaim (d’abeilles) en anglais), donc les similitudes sont totalement assumées. La série pousse l’adoration dans ses recoins les plus sombres, dans une épopée sanglante et l’extrême, qui va d’abord sembler excessive dans sa vision du fandom, avant de déranger alors que Swarm montre les failles du semblant d’anonymat des réseaux sociaux.

1/ Analyse percutante des réseaux sociaux : Fandoms, Stans et conséquence

En sept épisodes férocement addictifs et dérangeants, Swarm scrute les dérives du fandom excessif, choisissant ici une star factice ressemblant de très près à une certaine Beyoncé. Surnommée « Queen Bee (reine des abeilles) » par ses fans, Beyoncé a suscité l’engouement (et les dérapages) de fans partout dans le monde qui alimentent et partagent la moindre news autour de la pop star, pouvant aussi se dresser telle une armée (les Bey-Hive, (déformation de « behive » qui signifie « ruche ») pour réduire au silence les détracteurs et défendre leur idole face à la moindre critique négative. À l’instar de Beyoncé, il existe d’autres nombreux fandoms tout aussi actifs (ou qui l’ont été dans le passé) notamment sur les réseaux sociaux, prêts à dégainer leurs claviers : Britney Army, Beliebers, Swifties, Little Monsters, Arianators, Army, etc. Les membres de ces groupes de fans sont maintenant appelé des « Stans », c’est-à-dire des fans extrêmes à l’image du fameux Stan de la chanson d’Eminem (oui, celui qui se tue et entraine sa femme enceinte parce qu’Eminem n’a pas répondu à ses lettres).

La série Swarm s’inscrit dans cette tendance avec une héroïne fan de cette Ni’Jah et membre (hyper)actif du fandom, appelé les « Swarm ». Après le choc vécu dans le premier épisodes, le personnage central décide de confronter et d’anéantir ceux qui osent, de loin, critiquer son idole coûte que coûte.

2/ L’impact du virtuel dans le réel : le passage à l’acte

Il y a quelques années, le présentateur américain Jimmy Fallon avait lancé une chronique dans son émission, appelée « Mean Tweets » ou des stars lisaient des tweets négatifs voire insultants à leurs sujets. L’idée était d’en rire mais aussi de montrer que l’anonymat des claviers permet à certains de se lâcher et d’oser des dires des choses qu’ils n’auraient pas le cran dire en face. La chronique était l’occasion de rappeler que les célébrités restent des êtres humains et que les mots ont un pouvoir.. Alors qu’on parle beaucoup de harcèlement en milieu scolaire, surtout depuis l’avénement des réseaux sociaux, les stars de tous poils sont régulièrement confrontées à des remarques négatives, mais aussi des insultes et parfois même des menaces horribles. Le revers de la médaille quand on est célèbre, certes, mais les « haters » agiraient-ils de la même façon s’ils se trouvaient face à la personne qu’ils insultent ou menacent ? Pas sûr.

C’est là qu’interviennent souvent les armées de Stans, capable de déferler comme un tsunami sur celui ou celle qui ose s’en prendre à leur idole, repartageant l’infâme tweet pour inciter les autres Stans à s’en prendre à lui et allant parfois même jusqu’à traquer la personne derrière la toile. Il y a de nombreux exemples de haine caractérisée et ciblée sur les réseaux sociaux qui ont eu des conséquences plus ou moins dramatiques : retrait de la personne attaquée (comme récemment Ariana DeBose après sa performance aux Baftas), « cancel » dénonciateur ou accusateur (sert à annihiler une personne afin qu’elles perdent tous ses privilèges, qu’elle ne puisse plus travailler, etc.) ou voire même le suicide des personnes harcelées.

Mais que ce passerait-il si un des Stans se mettait à passer à l’acte ? C’est ce que Swarm explore au cours des épisodes, alors que l’héroïne décide de s’en prendre à ceux qui osent dénigrer son idole. Derrière les apparences frontales, Swarm dresse aussi le portrait d’un personnage complexe, dont j’aurai aimé comprendre un peu plus ses traumas originaux qui l’ont menée sur ce chemin.

3/ Gore, violent et dérangeant : portrait d’une génération paumée

Avec pour point de départ une jeune femme passablement dérangée, Swarm dresse une Amérique aux antipodes de la super-star qui hante le récit. À travers les failles d’un pays connu pour ses dérapages policiers, la jeune Dre se faufile dans l’ombre pour traquer ses prochaines victimes avec une aisance presque inquiétantes. La série en profite ainsi pour exprimer le désintérêt d’un pays pour sa population noire et pauvre, au passage. Mais là où Swarm percute de plein fouet, c’est dans ses pointes de comédies noires à la violence souvent graphique et surtout frontale. Au-delà des meurtres, le ton est d’un cynisme glaçant, qui touche son apogée au contacte d’une micro-secte obscur ou, pire, au détour d’une romance qui aurait pu être salvatrice.

Jusqu’au-boutiste, Swarm délivre sept épisodes époustouflants, aux messages multiples qui égratignent une génération paumée. Entre un star-système superficiel et aveugle qui nourrit son égo des frasques de ses fans, et un monde virtuel qui semble annihiler toutes les barrières sociales faisant du harcèlement une arme de destruction massive, Swarm met en exergue un gouffre social béant, permissif et effrayant. Et si la génération « no future » vivait son deuxième acte perdue dans l’anonymat de la grande toile ?

Au casting, Domininque Fishback (The Hate U Give, Judas and the Black Messiah, The Deuce…) porte la série avec brio, aussi captivante qu’inquiétante. L’actrice est incroyablement tant elle parvient à véhiculer autant de fragilité qu’un malaise palpable et jubilatoire, alors qu’on finit toujours par se demander quel sera son prochain éclat. Autour d’elle, l’ombre de Nirine S. Brown hante la trame, tandis que les épisodes s’enchaînent avec des invités plus ou moins connus : Chloe Bailey (Black-ish, Grown-ish…), Rory Culking (Scream 4, Sur Ordre de Dieu…), Paris Jackson (American Horror Stories…) et même la chanteuse Billie Eillish. 

En conclusion, La série Swarm, produite en partie par Donald Glover, est une satire cinglante de la génération internet, dans une épopée sanglante, dérangeante et jubilatoire qui dévoile les failles du semblant d’anonymat des réseaux sociaux. À voir – âmes sensibles s’abstenir.

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