Animation

[COUP DE CŒUR] Zootopie 2, de Byron Howard et Jared Bush

Le pitch : Zootopie 2 permettra de retrouver le savoureux duo de choc formé par les jeunes policiers Judy Hopps et Nick Wilde, qui, après avoir résolu la plus grande affaire criminelle de l’histoire de Zootopie, découvrent que leur collaboration n’est pas aussi solide qu’ils le pensaient lorsque le chef Bogo leur ordonne de participer à un programme de thérapie réservé aux coéquipiers en crise. Leur partenariat sera même soumis à rude épreuve lorsqu’ils devront éclaircir – sous couverture et dans des quartiers inconnus de la ville – un nouveau mystère et s’engager sur la piste sinueuse d’un serpent venimeux fraîchement arrivé dans la cité animale…

Alors que la mode est aujourd’hui aux adaptations des dessins animés classiques en live-action, les suites de ces mêmes classiques était historiquement reléguées à un format Direct-to-DVD (qui aujourd’hui, ce serait plutôt une sortie sur plateforme, telle que Disney+ en l’occurence). Mais dans les années 2010 une tendance émerge coté maison Disney et des succès en salles ont rapidement été déclinée en suites sorties au cinéma comme Ralph 2.0, La Reine des Neiges 2 ou encore Vaiana 2 l’année dernière. Et au milieu de tout ça, il y avait Zootopie, sorti en 2016, sacré à l’Oscar du Meilleur film d’animation en 2017 et devenu un phénomène mondial, quatrième film d’animation de l’histoire à franchir le milliard de dollars. La promesse d’une suite s’est vite imposée… mais il aura fallu attendre presque dix ans pour la voir enfin arriver en salles.

Et l’attente se comprend. Après un film aussi riche et ambitieux, impossible de livrer une suite tiède sans risquer la redite. Rich Moore quitte le navire, mais Byron Howard (Raiponce…) et Jared Bush (Vaiana : La Légende du Bout du Monde…) — qui avaient déjà collaboré sur Encanto : La Fantastique Famille Madrigal — restent aux commandes pour ce nouvel opus effervescent, coloré et truffé d’idées. Le premier Zootopie s’était distingué par sa double lecture, parlant autant aux enfants qu’aux adultes, à travers ses thèmes liés à l’écologie, aux discriminations et aux préjugés. Derrière son duo improbable – un lapin flic et un renard arnaqueur – le film bâtissait un monde d’une inventivité folle, où chaque détail faisait écho à nos sociétés humaines. L’enjeu était donc immense : prolonger cet univers sans le recycler. Et très honnêtement, je n’y croyais qu’à moitié.

Et pourtant dès les premières minutes, Byron Howard et Jared Bush parviennent à nous replonger dans le monde festif et foisonnant de Zootopie. Certes, quelques rappels appuyés au premier film ouvrent le bal, mais l’énergie, la richesse visuelle et la vitalité du monde opèrent immédiatement. L’histoire se déroule dans la continuité directe du premier opus et confronte Judy et Nick aux conséquences de leur succès. Leur capacité à faire équipe est mise à l’épreuve, leurs différences ressurgissent, et l’arrivée inattendue d’un serpent dans cette cité de mammifères vient bouleverser l’équilibre établi. L’enquête relance le duo dans une aventure débridée, rythmée et euphorisante.

Comme je l’ai dit plus haut, la force du premier film, c’est d’avoir su imaginer un monde qui s’adapte à tous les animaux (ou plutôt mammifères) quelque soit leurs tailles, leurs natures ou encore leurs rapports entre deux (réels ou réputés). Zootopie 2 va plus loin et ce sont, encore une fois, les nombreux détails, références et clin d’œil qui vont donner au film ce petit truc en plus ingénieux qui ravira les plus grands. En effet, le film puise dans la pop culture et l’imaginaire collectif. De Ratatouille à Shining, en passant par Le Silence des Agneaux (scène apparemment raccourcie dans le montage final, by the way) ou des jeux comme Hungry Hippos ou le courant rapide du Monde de Némo. Le film de Byron Howard et Jared Bush est sans cesse rehaussé par ces petites touches faussement anodines et malicieuses comme Gnu Jersey (pour New Jersey), sacs de luxe Nucci (Gucci), le festival Burning Mammals (pour Burning Man), Zoogle (pour Google), Huluzoo et ses affiches de films détournées), Piña Koalas, la sérénade de La Belle et le Clochard… Les réalisateurs et les animateurs font preuve d’une générosité créative qu’il distille habilement ça et là, qu’il s’agisse d’un détail en arrière-plan, d’une poêle à frire rappelant l’arme favorite de Raiponce, de dialogues ou gestuelles inspirés.

C’est d’ailleurs un pari risqué, tant l’histoire est déjà dense. Une bonne partie des informations passera au-dessus de la tête des plus jeunes, mais leur entourage – et les adultes amateurs d’animation – y trouvera un terrain de jeu jubilatoire. Et oui, car au-delà de son apparente légèreté, Zootopie 2 aborde à nouveau des sujets sensibles. C’est d’ailleurs intéressant que le film soit sorti à l’époque de Thanksgiving, puisque le film va s’interroger sur les fondateurs de la ville et glisser une réflexion très actuelle sur la colonisation, à travers le traitement des reptiles, jugés dangereux à cause de leur apparence et de leur réputation. Un choix d’autant plus audacieux venant de la maison de Mickey, au vu de la politique américaine actuelle et de l’état du monde en ce moment !

Heureusement, même sans saisir toutes les références ni adhérer pleinement aux thématiques, Zootopie 2 reste un divertissement génial même dans une lecture linéaire. Les héros attachants participent à une enquête pleine de rebondissements, d’intrigues amusantes et parfois même palpitantes (j’ai failli revivre le trauma de Toy Story 3 !). Avec ses allures de jungle animale, le film propose une galerie de personnages haut en couleurs qui réservent toujours son lot de surprise, faisant de chaque ajout un élément utile à l’histoire et non pas juste un prétexte pour vendre des peluches (c’est déjà le but du film, non ?).

Visuellement, Zootopie 2 propose une animation lumineuse et moderne, tout en respectant les codes qui ont fait le succès du premier film. Les détails sont soignés et certains plans offrent une belle démonstration en ce qui concerne les effets de textures (le contrastre entre la fourrure sur la patte de Judy Hoops qui tient un jouet en plastique par exemple). À l’oreille, c’est le talentueux Michael Giacchino qui rempile pour la bande-originale, tandis que Shakira propose une nouvelle chanson “Zoo” qui donne autant envie de danser que “Try Everything” à l’époque du premier volet.

Au casting vocal et en VO, on retrouve Ginnifer Goodwin (Why Women Kill, Once Upon a Time…) et Jason Bateman (Ozark, Carry-On…) dans les rôles principaux, tandis qu’Idris Elba (Sonic 3, Beast…), Alan Tudyk (Superman, Resident Alien…) ou encore Jenny Slate (Jamais Plus, Venom…) et évidemment la chanteuse Shakira reprennent du service. Chez les petits nouveaux, il faudra tendre l’oreille pour reconnaître Ke Hui Quan (Everything Everywhere All At Once, Loki…), Fortune Feimster (The L Word : Generation Q, The Mindy Project…) et Adam Samberg (La Guerre des Rose, Lee Miller…), qui incarnent respectivement Gary De’Snake, Nibbles Maplestik et Pawbert Lynxley.

À découvrir également, en vrac, Jean Reno (Loup-Garous, Antigang, la Relève…), David Strathairn (Nightmare Alley, Nomadland…), Quinta Brunson (Abbott Elementary…), Brenda Song (The Last Showgirl, Dollface…), Patrick Warburton (Bloodlines…) et Macaulay Culkin (Entergalactic, American Horror Story : Double Feature…), puis des caméos vocaux de Danny Trejo, Josh Gad, Ed Sheeran ou encore – pour faire le lien avec Vaiana, surement – Dwayne Johnson et Auli’i Cravalho !

En conclusion, avec ses presque deux heures bien remplies, Zootopie 2 parvient non seulement à proposer une suite inventive, drôle et amusante, qui prolonge avec intelligence les bonnes idées du premier opus, tout en enrichissant sa mythologie. Howard Byron et Jared Bush signe une suite ensoleillée qui donne le sourire du début à la fin. Et s’il faut attendre à nouveau dix ans pour un troisième film, je ne dirais pas non, tant que ce niveau de qualité et de cinéma est au rendez-vous ! À voir, évidemment !

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