Le pitch : Le Dr. Nate Daniels, revient en Afrique du Sud, où il a autrefois rencontré sa femme aujourd’hui décédée, pour y passer des vacances prévues de longue date avec ses deux filles dans une réserve naturelle, tenue par Martin Battles, un vieil ami de la famille, biologiste spécialiste de la vie sauvage. Mais ce repos salvateur va se transformer en épreuve de survie quand un lion assoiffé de vengeance, unique rescapé de la traque sanguinaire d’ignobles braconniers, se met à dévorer tout humain sur sa route et prend en chasse le docteur et sa famille.
Un lion meurtrier vs une famille de touristes bloquée en pleine brousse… Le synopsis du film avait tout du nanar estival tant il ressemble à de nombreux téléfilms trouvables quelque part dans les affres d’internet. Le dernier film que j’ai vu réalisé par l’islandais Baltasar Kormákur, c’était Everest et autant dire que j’en étais pas ressortie conquise. En bref, je ne m’attendais pas à grand chose en allant voir Beast, au-delà d’un film pop-corn.
Alors que l’introduction pose l’intrigue, je m’inquiète : va-t-on vraiment personnifier le lion en lui créant une sorte de rage vengeresse parce que des braconniers ont tué sa famille ? Et bien oui !
Et pourtant, malgré un pitch un poil putassier, Baltasar Kormákur parvient à faire des merveilles (je m’emballe !) et Beast échappe à la case nanar pour s’inscrire dans un survival ardent, nerveux et prenant jusqu’au bout, alors que la famille se retrouve aux prises avec un lion sanguinaire.
OK, le film n’échappe pas aux personnages crispants, comme une des deux gamines qui ne fait que prendre des initiatives totalement stupides aux moments où le danger est plus que présent, tandis que l’ensemble reste relativement prévisible. Certes. J’avoue même que l’agacement a failli prendre le dessus… Mais la réalisation de Baltasar Kormákur sauve largement l’ensemble ! En effet, si les débuts semblent assez standards entre l’introduction des personnages et des images à couper le souffle de la faune et de la flore africaine, le réalisateur va petit-à-resserrer l’image quand la menace se rapproche. De sa caméra habile, le film nous accroche aux abords de l’action grâce à des séries de courts plans séquences aux cadres resserrés, qui rythment intelligemment les moments de respirations, de tensions et d’accélérations. Du coup, le spectateur est à la merci du point de vue des personnages et dans l’incapacité de prévoir l’arrivée du lion, ce qui rend l’expérience toujours plus haletante et excitante. De plus, le fait d’être aussi proches des inquiétudes des personnages les rend plus accessible et on s’imagine facilement dans ces décors arides, à l’affût d’un ennemi imprévisible et surtout invisible tant qu’il n’est pas sous nos yeux.
J’ai passé la séance sur le rebord de mon siège alors que l’histoire de transforme en un piège à ciel ouvert. Les personnages sont des proies malheureuses sur les terres d’un prédateur bien décidé à leur faire la peau et ce postulat suffit à rendre Beast aussi stressant que captivant. L’ensemble m’a fait pensée à une version voisine mais jusqu’au-bout-iste du film Le Territoire des Loups. Cependant, là où Joe Carnahan métaphorisait sur la survie d’un homme sans raison d’être et se concluait en laissant l’imagination du spectateur faire le reste ; Baltasar Kormákur, lui, explore jusqu’au bout son concept quitte à parfois aller trop loin dans un final qui pourrait faire rougir (ou sourire) Simba et Scar (si ce dernier était toujours en vie). Pourtant, c’est bien le coté frontal de Beast qui fait son effet, sans pour autant recourir à des facilités grossières comme d’autres ont pu le faire avec des créatures moins réalistes (Rampage, En Eaux Troubles…).
Ici, le film tient toutes les promesses annoncées grâce à une tension palpable qui met les nerfs à vif. J’ai partagé de nombreuses exclamations avec le reste de la salle, lors de ma séance, tant j’étais sur les dents jusqu’à la fin.
Au-delà de l’histoire, la représentation des personnages dans Beast est intéressante. Une famille de touristes en Afrique, un guide qui les emmènes dans la brousse… On pourrait aisément imaginer des touristes Blancs et un autochtone Noir. Le casting se moque de nos habitudes intériorisées et propose un local sud-africain et Blanc qui accueille une famille afro-américaine, qui n’a pas l’habitude de fouler le sol africain. C’est peut-être un simple détail ou heureux hasard, mais cela reste un message fort contre les idées préconçues qu’on pourrait avoir sur les origines, et donc les rôles, des uns et des autres dans ce genre de récit.
Au casting justement : Idris Elba (Trois Mille Ans à t’Attendre, Sonic 2, The Suicide Squad…) se dresse en patriarche protecteur, ayant la double tâche de sauver sa progéniture mais également de la reconquérir suite à un drame qui a ébranlé la famille. Autour de lui, Leah Jeffries (Empire…) incarne l’enfant fûtée et le personnage d’Iyana Halley (This Is Us, Good Trouble…) aurait dû être donnée en pâture le plus tôt possible (:D), tandis que Sharlto Copley (The Last Days of American Crime, Free Fire, Chappie…), toujours trop rare au cinéma, reste en retrait pour donner la part belle au héros du film.
En conclusion : alors que j’attendais un film moyen, je me suis follement amusée devant Beast. Baltasar Kormákur dépoussière une formule habituellement reléguée à du spectacle bourrin ou aux nanars estampillés Syfy (hello, les films de requins !) et livre un film survivaliste bien rôdé et surtout bien filmé. Stressant, nerveux et, bien sûr, mordant, Beast est pour moi le bon gros frisson jubilatoire de l’été. À voir.