Super héros

[CRITIQUE] Venom, de Ruben Fleischer

Trop court, parfois incohérent avec son propre concept et ultra prévisible, Venom débarque avec un bon nombre de boulets à tirer, en plus d’avoir un antagoniste bien connu qui manque à l’appel. Pourtant, malgré toutes les critiques qu’on peut formuler sur le film de Ruben Fleischer, l’ensemble reste néanmoins pétri de bonnes idées et de personnages solides qui semblent avoir été mis à mal des ambitions marketing mal assumées. Dommage, car Venom avait (presque) tout ce qu’il faut pour jouer dans la même cour déjantée qu’un Deadpool, avec ou sans araignée au plafond.

Le pitch : Le journaliste Eddie Brock mène une enquête sur le dirigeant d’une société nommée Life Foundation. Cette dernière travaille sur des matériaux extraterrestres en menant des expériences sur des humains. Eddie est alors infecté par un symbiote, qui va petit à petit prendre le contrôle de son corps et de son esprit, pour devenir Venom.

Critique rédigée par Kingdork (rédacteur schizophrène qui change souvent de nom…) 😉

Bon. Disons-le franchement : Venom est un mauvais film. Voilà, c’est dit.
Certes, il y a eu bien pire dans le genre. OK, on n’atteint pas le niveau d’un Catwoman de Pitof (2003) ou autre Elektra de Rob Bowman (2004), des spin-offs embarrassants d’incompétence à tous les niveaux et boursouflé des plus mauvaises idées imaginables. Soit. Mais Venom est un mauvais film.

Il est dans un premier temps presque impossible de passer outre l’aspect relativement cynique de l’entreprise de Sony quant à cette volonté de capitaliser sur le plus populaire des Némésis de Spider-Man. Depuis la fin des années 90, le producteur Avi Arad (codirecteur de Marvel Entertainment) en rêvait, ce qui l’avait déjà poussé en 2007 à imposer le personnage de Venom à un Sam Raimi peu convaincu. Le résultat est celui que l’on connait… Spider-Man 3 est un troisième épisode décevant qui a enterré la franchise dans une quasi-traversée du désert, puis connu une tentative désastreuse avec The Amazing Spider-Man, avant d’être secouru in-extremis par Marvel Studios.

Mais voilà que dans cette ère du Comic Book Movie en roi suprême au box office mondial, Sony s’est senti pousser des ailes. Ainsi la volonté de lancer leur propre « cinematic universe » (un must pour tous les studios hollywoodiens désormais) se concrétise avec Tom Hardy (The Revenant, Legend, Mad Max: Fury Road…) dans le rôle titre, dirigé devant l’objectif de Ruben Fleischer (Bienvenue à Zombieland, Gangster Squad…).

Et comme énoncé dans l’introduction de cette critique, Venom est un mauvais film. Non pas parce qu’il fait une croix sur une apparition de Spider-Man à qui Venom doit sa création – car pour ceux qui ne le savent pas, l’Homme-Araignée est la seule raison pour laquelle ce personnage existe : forts d’une haine mutuelle pour Spider-Man, le symbiote (créature alien liquide douée de sentience) et Eddie Brock (journaliste déchu) s’unissent pour former Venom, un des méchants les plus iconiques du Tisseur.

La raison pour laquelle Venom est un mauvais film n’est pas là. Alors pourquoi ?
Tout simplement parce que le film est doté d’une trame scénaristique tellement fine qu’elle en devient transparente : des personnages qui sont en grande majorité dépourvus d’un quelconque arc narratif, de nombreuses incohérences de situations ou de réactions qui forcent le facepalm, des dialogues d’exposition bancals en guise d’intentions de développement ou carrément risibles et d’un niveau primaire… Les effets visuels en dent de scie sont parfois loin d’être convaincants et il faut également composer avec l’un des pires troisièmes actes vus depuis un moment (sous-entendu : des enjeux expliqués vers les dix dernières minutes du film pour être résolu dans la foulée histoire de remplir le cahier des charges). Bref, rien ne va.

Et pourtant… Pourtant… Comment dire? C’est aussi un des blockbusters les plus funs que j’ai vu ces derniers mois. Objectivement tout est fait pour que le film ne marche pas, mais il marche. Dans cette optique nanar-esque et datée, le film a l’air tout droit sorti des 90’s ou du début des années 2000 : un défaut qui devient une qualité puisque Venom parvient à être un divertissement ma foi… Fort divertissant. Cet aspect est en majeur partie assurée par un Tom Hardy déchaîné et résolument cabotin qui assure le double service, à savoir l’interprétation d’Eddie Brock et de son alter ego gluant et sociopathe. Deux personnalités bien distinctes et forcées de cohabiter dans le même corps en parfaite symbiose (le seul vrai enjeu du film). Ce postulat amène des situations bien cocasses et jouissives tant il est évident que l’acteur se donne à 300% et s’amuse sous nos yeux.

Le résultat est dangereusement communicatif, et les interactions entre Brock et l’entité intergalactique qui élu son corps comme domicile font le sel du film. Si le manque d’alchimie entre Tom Hardy et son « love interest » Michelle Williams (The Greatest Showman, Tout L’Argent du Monde, Manchester By The Sea…) se fait beaucoup ressentir dès leurs premières minutes de présence à l’écran, l’actrice semble se prêter au jeu et ce, malgré l’insignifiance globale et totale de son rôle. Ce n’est en revanche pas le cas du pourtant génial Riz Ahmed (Les Frères Sisters, The Night Of, Night Call…) trop en retenue, comparé aux péripéties « Charlie Chaplin-esques » du rôle-titre. Le fait est que son personnage semble englué dans le peu d’intrigue que le film essaye de maintenir et c’est l’élément le plus faible du film.

En effet, quand il s’agit de développer le pourquoi du comment des motivations et actions des uns et des autres… C’est la catastrophe. Il n’y a pas d’autre mot. Que ce soit les alliés d’Eddie Brock, les changements d’états d’âmes de Venom, les motivations du méchant boss de fin bonus qui passe tout le film (plus de six mois en temps diégétique) à voyager de la Malaisie à San Francisco (en passant par la case aéroport, hein)… C’est tout bonnement ridicule. Ne cherchez pas à comprendre ou défendre, ce n’est pas la peine. De toutes façons, le film avance à une telle vitesse qu’on ne vous laisse pas le temps de vous attarder dessus.

En conclusion, Venom opère un bien étrange numéro d’équilibriste et oscille sans grande grâce et presque dangereusement entre la frontière du second degré voulu et assumé et celle du nanar incompétent qui nous force à lui rire au nez. Il est dur de percevoir où le film se situe réellement. Mais qu’importe : si on oublie une scène post-générique complètement ratée qui veut nous vendre une franchise qui n’a pas vraiment lieu d’être, Venom s’avère être un bon divertissement… « malgré lui » ?

PS : ne partez pas trop vite, il y a 2 scènes post-génériques 🙂

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