Thriller

[CRITIQUE] La Femme à la Fenêtre, de Joe Wright

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Le pitch : À New York, le docteur Anna Fox est une psychologue pour enfants. Agoraphobe, elle ne sort jamais de chez elle. Lorsque la famille Russell emménage, elle se met à les espionner. Elle va alors être témoin d’un crime.

Après les grands succès qu’ont été les adaptations de thrillers Gone Girl, écrit par Gillian Flynn et réalisé par David Fincher, et La Fille du Train, écrit par Paula Hawkins et réalisé par Tate Taylor, les studios hollywoodiens se sont empressés de piocher dans les romans à succès où crimes et apparences se mêlaient dans des intrigues souvent palpitantes. Et comme tout phénomène de modes, il y a forcément des ratés, c’est là qu’arrive La Femme à la Fenêtre, réalisé par Joe Wright (Les Heures Sombres, Pan, Anna Karénine…), dont la sortie en salles a été compromise par la pandémie Covid-19. Par conséquent, le film est actuellement disponible sur Netflix.
À l’origine, La Femme à la Fenêtre est un roman écrit par A.J. Finn, édité en 2018 et il est difficile de nier la ressemblance frappante avec le pitch de La Fille du Train de Paula Hawkins, car là aussi on y découvre une femme témoin d’un crime, mais dont les paroles sont mises en doutes car elle a des problèmes d’addiction et un lourd passif.

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À la lecture, j’ai trouvé le livre d’A.J. Finn laborieux et embourbé par des passages descriptifs et ronflants à rallonge.
Le point positif du film, et comme beaucoup d’adaptations finalement, c’est que le scénario ramasse l’intrigue et condense le récit pour qu’il soit plus digeste. Cependant, cet atout devient vite une faiblesse quand on a lu le livre, puisque l’installation semble survoler beaucoup d’aspects importants autour de la routine de l’héroïne, Anna, dont l’agoraphobie paralysante a développé des troubles collatéraux, comme l’espionnage assidu de son voisinage et des conversations imaginaires.
Le film de Joe Wright se débarrasse au plus vite des prémices de l’histoire pour en venir à l’essentiel. Alors que la réalité et les illusions se confondent, La Femme à la Fenêtre jongle mollement entre ses différents personnages tous suspects, mais laisse trop rapidement filtrer des indices sur la véritable menace. Du coup, quand le twist se révèle, je trouve que l’effet de surprise ne fonctionne pas. Malgré un joli casting, j’ai trouvé les personnages et les dialogues creux. La Femme à la Fenêtre se repose uniquement sur une Amy Adams relativement convaincante, certes, mais dans un rôle hyper contemplatif et ralentie par ces addictions, ce qui rend l’ensemble peu dynamique et longuet.

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En fait, alors que le film a été tourné avant la pandémie mondiale (il devait sortir fin 2019 puis au printemps 2020), on dirait que Joe Wright a filmé durant des conditions de tournages contraignantes : si le presque huis clos n’aide pas à se départir de cette sensation, le look télétravail en pyjama de l’héroïne et le manque générale d’interaction entre les personnages entérinent l’effet aseptisé et négligé de l’ensemble, comme s’il avait été fait avec les moyens du bord (et non produit par Fox 2000 Pictures et la 20th Century Studios).

En gros, on s’ennuie vite dans ce film qui dure tout de même 1h40. Le manque d’étoffe au niveau des contextes et des personnages, ainsi que le récit précipité pour créer de la tension contribue à rendre La Femme à la Fenêtre soporifique, si bien qu’au lieu de pousser le spectateur à se creuser les méninges et à jouer le jeu, j’ai plus eu l’impression de subir le film et d’attendre le dénouement. De plus, une fois le twist révélé, Joe Wright englobe le final à la hâte, comme un bon vieux téléfilm aux enjeux transparents et à l’issue téléphonée.

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Au casting, je n’ai jamais cachée que je n’étais pas la plus grande fan d’Amy Adams (Sharp Objects, Justice League, Vice…), mais je reconnais que c’est une excellente actrice… même si c’est difficile à croire dans ce film, tant son personnage paumée ne parvient pas à susciter de l’empathie. Autour d’Amy Adams, un bel ensemble s’agite mais sous forme d’apparitions parfois proches du caméo : Julianne Moore (Gloria Bell, Bienvenue à Surbubicon, Kingsman : Le Cercle d’Or…), malgré sa rareté dans le film, a probablement le plus de lignes dans son script que le reste des personnages plus récurrents (!) et autant dire que sa présence solaire réveille temporairement l’intrigue, dont Gary Oldman (Mank, Les Heures Sombres…), Wyatt Russell (Overlord, Instalife…), Brian Tyree Henry (Chucky : Child’s Play, Joker…) et surtout Jennifer Jason Leigh (Les Huit Salopards…) qui fait presque de la figuration. A noter également la présence chimérique d’Anthony Mackie (The Falcon And The Winter Soldier, Zone Hostile…), tandis que Fred Hechinger (La Grande Traversée, Dernière Année…) rate à un chouilla la transition de son personnage en cours de route, ce qui dessert l’ensemble du film.

En conclusion, je n’aurai peut-être pas dû lire La Femme à la Fenêtre avant de voir le film, car du coup j’ai trouvé le film de Joe Wright bricolé à la hâte et mollasson, épaissi par des personnages stagnants. On est loin du triller palpitant qu’était La Fille du Train et plus proche de l’effet soporifique d’un Avant d’Aller Dormir. À éviter.

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