Épouvante-horreur

[CRITIQUE] L’Exorciste : Dévotion, de David Gordon Green

Le pitch : Depuis que sa femme, enceinte, a perdu la vie au cours d’un séisme en Haïti douze ans plus tôt, Victor Fielding élève, seul, leur fille Angela. Un jour, Angela et son amie Katherine disparaissent dans les bois avant de refaire surface 72 heures plus tard sans le moindre souvenir de ce qui leur est arrivé… Dès lors, d’étranges événements s’enchaînent et Victor doit affronter de redoutables forces maléfiques. Désespéré et terrorisé, il sollicite la seule personne encore en vie qui ait jamais été témoin de pareils phénomènes: Chris MacNeil.

Il y a 50 ans sortait ce qui allait être l’un des films les plus terrifiants de l’histoire du cinéma : L’Exorciste, réalisé par William Friedkin, adapté d’un roman écrit par William Peter Blatty. Film culte parmi les cultes qui a inspiré beaucoup d’autres films de genre, L’Exorciste (1973) a été le premier d’une séries de films (suites, spin-off, préquels…) qui n’ont jamais été à la hauteur et d’une série télévisée.
Pour ma part, j’ai découvert ce film autour de mes 14 ans devant Les Jeudis de l’Angoisse (les vrais sachent) et, peut-être que c’était l’attente qui était trop grande, mais j’ai dormi comme un bébé après. Quelques années et revisionnages plus tard, j’ai pris plaisir à revoir le film qui est un trésor de mises en scène, d’idées novatrices (surtout pour l’époque) et le sujet d’interprétations aussi diverses qu’intéressantes. Mais toujours aucune flippe.

C’est donc sans grande attente que je suis allée voir L’Exorciste : Devotion et ce, pour plusieurs raisons. D’abord, revisiter un vieux succès est devenu monnaie courante et est bien trop souvent le résultat d’ambitions pécuniaires qui dépassent largement l’envie de faire un bon film. Ensuite, les films d’horreur actuels ont souvent tendance à se réfugier derrière des artifices usés jusqu’à la corde pour faire sursauter son spectateur, au lieu de construire un storytelling solide empreint de frayeur et de tension. Enfin, David Gordon Green est responsable de la récente tragédie trilogie Halloween qui, de film en film, a sombré dans la caricature grotesque et un hommagé raté à l’héritage de John Carpenter. Pourtant, ce réalisateur, quand il ne joue pas sur un terrain horrifique, nous avait déjà proposé avec des drames plus ou moins intéressants, tels que Joe, Que le Meilleur Gagne ou encore Stronger. Allait-il réussir à retrouver la verve de son premier Halloween en proposant une suite à l’Exorciste ?

Et bien non ! Comme attendu, L’Exorciste : Devotion est un patapouf informe qui régurgite les artifices les plus marquants du film original dans une soupe fadasse, assaisonnés à du mauvais maquillage et des jumpscares sonores. Depuis un voyage (inutile) à Haïti jusqu’à la possession inexpliquée de deux adolescentes, le film s’éparpille dans un récit mou du bulbe tente vainement d’épater un public impressionnable avec quelques grimaces patibulaires et des sourcils qui disparaissent. Le seul élément intéressant réside dans le scepticisme d’un des personnages adultes, mais cela est rapidement balayé par des croyances religieuses imposées aux forceps pour faire avancer l’intrigue et, surtout, ramener Chris MacNeil (la mère de Regan dans le premier film). Regards de travers et voix trafiquées sont donc au menu d’un film incroyablement paresseux où les personnages s’agitent comme des poules à la tête fraichement coupées.

Là où l’œuvre de William Friedkin proposait une mise en abîme lancinante et des manifestations de plus en plus inquiétante, David Gordon Green cède à la mode du nouveau millénaire et livre un récit hâtif autour de ces adolescences boudeuses dont la dentition s’aggrave de minute en minutes. Globalement, L’Exorciste : Devotion tente de proposer quelques séquences d’effroi, mais perd tellement de temps à jouer la carte du démonstratif (oh lala du sang, de la voix rauque, un visage déformé… boooriiiing !) que le fil conducteur se perd en cours de route. Résultat, peu de réponses émergent du récit, ce sera au spectateur d’imaginer un lien ou un potentiel retour de Pazuzu (le démon du film original), avant d’assister à la scène d’exorcisme la plus pathétique de l’histoire (j’exagère peut-être, mais on doit pas être loin).

Au casting, on s’ennuie un peu évidemment : si Leslie Odom Jr. (Glass Onion : Une Histoire à Couteaux Tirés, Many Saints of Newark, Hamilton…) avait été la seule figure parentale et sceptique, cela aurait pu être intéressant, mais voilà qu’il est flanquée d’une Jennifer Nettles (chanteuse de musique country à la base) au surjeu insupportable et d’un Norbert Leo Butz (Le Monde de Nate…) sans intérêt. Autour deux, Ellen Burstyn reprend son rôle et fait l’effet attendu (wouaaah) mais sans plus, tandis qu’Ann Dowd (The Handmaid’s Tale, Hérédité…) et E.J. Bonilla (Les Baronnes…) en font des caisses sans jamais réussir à convaincre.
Au centre, il y a Olivia O’Neill et Lidya Jewett (Good Girls…), maquillées à n’en plus finir avec du carton-pâte. Si la seconde parvient parfois à créer un léger malaise sur quelques scènes, leurs interprétations consistent surtout à faire les gros yeux et cracher des répliques plus ou moins grossières. Bof.

Et puis, question subsidiaire : pourquoi l’affiche finale du film met-elle en avant l’actrice Olivia O’Neill (et sa vague ressemble à une jeune Linda Blair) et non Lidya Jewett, alors que l’intrigue générale tourne autour de son personnage ?

En conclusion : Passez votre chemin (mais restez dans la lumière). Et dire qu’une suite, The Exorcist – Deceiver (Trompeur), est déjà prévu pour 2025…

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