Le pitch : Un employé de banque, découvrant un jour qu’il n’est en fait qu’un personnage d’arrière-plan dans un jeu vidéo en ligne, décide de devenir le héros de sa propre histoire, quitte à la réécrire. Evoluant désormais dans un monde qui ne connaît pas de limites, il va tout mettre en œuvre pour le sauver à sa manière, avant qu’il ne soit trop tard…
Après un an de décalage – Covid oblige, le fameux Free Guy signé Shaun Levy et porté par le turbulent Ryan Reynolds est enfin arrivé en salles. Après sa trilogie La Nuit au Musée et les films Crazy Night et Les Stagiaires, le réalisateur habitué des comédies effervescentes revient avec un film inspiré par les jeux vidéos et notamment le sort des NPC/PNJ (non-playable character / personnage non joueur), à travers un blockbuster hilarant et bourrés de surprises.
Au départ, je n’étais pas très fan de l’idée, d’une part parce que Ryan Reynolds a tendance à surfer sur le même registre depuis Deadpool, donc je craignais l’effet étouffe-chrétien avec la surenchère de dialogues potaches ; et d’autre part, je trouvais le pitch légèrement calqué sur les prémices de La Grande Aventure Lego tant ce fameux Guy me rappelait la bonhommie naïve d’Emmett avec sa routine lisse incluant la même pause café matinale, bousculée par l’arrivée d’un personnage féminin badass et prête à en découvre avec le régime en place.
Sur ce deuxième aspect, je n’étais pas loin, mais heureusement, Free Guy s’émancipe rapidement de cette ressemblance, notamment en gardant un pied ancrée dans la réalité grâce à des protagonistes plus terre-à-terre. Le film de Shaun Levy suit donc deux parcours parallèles, mêlant aventures, luttes de pouvoir et parcours initiatique, dans un ensemble savoureux qui fait l’effet d’un bonbon acidulé dont on en redemande. Bien que le film soit nommé à son héros, Free Guy a la qualité d’être équitable et de laisser de la place à sa side-kick dont la storyline est plus conséquente et évidemment liée à Guy. L’histoire parvient à jongler habilement entre les intentions de ses personnages principaux dans une déferlante inventive, animée par ce héros qui prend de plus en plus d’assurance pour attirer sa belle et amplifiée par le combat de Millie alias Molotovgirl qui risque tout pour récupérer ce qui lui appartient. De plus, Free Guy parvient à créer un monde accessible à travers un jeu virtuel balisé, du coup, pas besoin d’être un ou une expert/e de Grand Theft Auto ou de Fortnite pour comprendre les principes de base qui sont énoncés. Et oui, même les n00bs sont les bienvenus.
Si le film accuse quelques longueurs en cours de route, c’est notamment parce que Shaun Levy ne se contente pas d’exposer son idée de base (le personnage non jouable qui prend vie) : le film écrit de vrais personnages et bousculent les idées reçues sur les films d’action, notamment les rôles attribués au genre. Ainsi, le double personnage incarnée par Jodie Comer prend plus de place que le héros, souvent mise en avant par rapport au héros qui écope parfois du rôle de side-kick maladroit et paumé. Aussi bien dans le monde virtuel que dans le monde réel où sans sa détermination, l’histoire aurait tourné court, elle incarne le fil rouge du film, tandis que les hommes autour d’elles sont en pamoison – ce qui change du format habituel. En effet, Free Guy cumule les effets de surprises, les gags plus ou moins prévisibles (mais rigolos quand même) les caméos et les easter-eggs référencés, mais pas les personnages. Du coup, dans sa poignée de personnages principaux, il y a une belle palette de caractères, laissant autant de places à l’humour qu’à la caricature d’une société capitaliste critiquant ouvertement l’industrie du divertissement symbolisé par un magnat diabolisé par le gain et la popularité facile. Derrière ce big boss et ses intérêts fluctuants, ne se cacherait-il pas une mignonne souris à grandes oreilles ? Le doute est permis !
Free Guy déborde d’imagination et Shaun Levy s’amuse dans cette toile démesurée, jusqu’à un final absolument géniale, pulsée par la pop-culture ambiante. Si l’ensemble s’essouffle un peu en cours de route, le dernier acte revitalise le film et même si l’issue un poil prévisible (à peine), Free Guy joue son va-tout avec brio, ce qui m’a rapidement fait oublier les moments où je dodelinais un chouilla de la tête. Après un été cinématographique marqué par des déceptions blockbusteriennes (Fast and Furious 9, The Suicide Squad…), Free Guy relève enfin le niveau en proposant un divertissement jubilatoire, où – sans avoir besoin de réfléchir – l’histoire est à la hauteur du spectacle proposé, sans chercher à abrutir le spectateur.
Au casting, je craignais la sur-présence de Ryan Reynolds (Hitman and Bodyguard 2, Pokémon: Détective Pikachu, Deadpool 2…). Il est évidemment le cœur du film, oui, mais Free Guy lui permet de temporiser son personnage ici moins Deadpoolien et plus accessible, puisque parfois touchant, souvent drôle et carrément attachant. J’ai aimé le voir évoluer aux cotés de Jodie Comer (The White Princess, Killing Eve…), une actrice so british que je suis depuis My Mad Fat Diary, dont le personnage permet d’étoffer l’ensemble, à la fois en étant une héroïne d’action mais également en portant l’intrigue plus terre-à-terre sur ses épaules. Face à eux, c’est Taika Waititi (The Suicide Squad, Jojo Rabbit, Thor : Ragnarok…), décidément incontournable cet été, qui prend le rôle du vilain, fort en gueule et en charisme peut-être un poil trop débordant.
À l’affiche également, on retrouve Joey Keery (Stranger Things…) en « man in the chair » dans un film qui n’en finit plus d’inverser les genres, Utkarsh Ambudkar (Mes Premières Fois, Mulan…) pour la touche de complicité corporate et Lil Rel Howery (Judas and the Black Messiah, Insecure…) en side-kick affable et trouillard.
Quelques surprises se cachent dans le casting, certaines dont j’aurai pu me passer dont l’indigeste Channing Tatum et ses sempiternelles pas de danses (pourquoi doit-il toujours danser ?), d’autres qui sont nettement plus cool (merci Disney).
En conclusion, alors que qu’une suite à Free Guy commence à se murmurer, le film de Shaun Levy offre la dose de divertissement tout public (ou presque) que j’attendais cet été. Globalement fun et original, Free Guy a su se départir de son pitch qui semblait déjà-vu/déjà-fait pour nous embarquer dans une aventure haute en couleurs, entre action, régression et bonne morale pour tous les héros du quotidien que nous sommes. À voir.