Sci-fi

[COUP DE CŒUR] The Creator, de Gareth Edwards

Le pitch : Dans un futur proche, les humains et l’intelligence artificielle (IA) se livrent une guerre sans merci. Joshua, un ex-agent des forces spéciales fragilisé par la disparition de sa femme, est recruté pour traquer et neutraliser le Créateur, l’insaisissable architecte d’une IA avancée à l’origine d’une arme qui pourrait mettre fin à la guerre… et détruire l’humanité tout entière. Avec l’aide d’une unité d’agents d’élite, Joshua traverse les lignes ennemies et pénètre au coeur de leur dangereux territoire. Il découvrira bientôt que l’arme funeste qu’il est chargé de détruire n’est autre qu’une intelligence artificielle supérieure qui a pris les traits d’un jeune enfant…

9 ans après l’excellent Godzilla, puis une incursion remarquée vers le coté obscur de la Force avec Rogue One: A Star Wars Story, Gareth Edwards est de retour sur le grand écran avec The Creator, un récit dystopique où l’intelligence artificielle et l’humanité s’affrontent. À l’image des films SF qui ont eu du succès ces derniers années, notamment ceux de Denis Villeneuve (Premier Contact, Blade Runner 2048, Dune…), The Creator s’épanouit dans une forme contemplative, à l’imaginaire flirtant avec une réalité très (trop) accessible. L’histoire se passe dans un futur lointain, certes, mais le sujet est tellement à notre portée, qu’on s’immerge avec une aisance vertigineuse dans ce monde déchiré entre l’Orient et l’Occident, l’humain et la machine…

Alors que l’intelligence artificielle est présentée comme une menace existentielle, le film se concentre autour d’un personnage qui va remettre en question sa vie et ses convictions, pour aller traquer une arme ultime potentiellement dévastatrice, dans le faible espoir de retrouver ce qu’il a perdu jadis. The Creator questionne l’Évolution et les avancées technologiques de plus en plus impressionnantes, tout à distillant des bribes de guerre de pouvoir pour manipuler les pions anonymes qui s’affrontent sans merci. À l’heure où le « vivre-ensemble » semble de plus en plus utopique, le film de Gareth Edwards fait l’effet d’une réponse à des décennies de cinéma, depuis les premiers Terminator ou Blade Runner, initiés par James Cameron et Ridley Scott, jusqu’au très récent M3GAN de Gerard Johnstone, en passant par des films comme I, Robot d’Alex Proyas, A.I. Intelligence Artificielle de Steven Spielberg, Ex Machina d’Alex Garland ou encore la saga Matrix des sœurs Wachowski. The Creator illustre à merveille le dilemme humain, à savoir la peur de se faire remplacer tout en s’évertuant, sous prétexte de découverte et d’avancée technologique, à créer son propre remplacement. The Creator propose une vision qui s’impose comme la finalité inéluctable à cette quête insatiable de sens et d’immortalité.

Heureusement, au-delà de mon impression pseudo-philosophique, Gareth Edwards livre surtout un film époustouflant et haletant, qui m’a accrochée de bout en bout. L’histoire est simple quand on décortique l’ensemble et se déroule sans véritable surprise, depuis la rencontre du héros avec l’enfant, jusqu’à ce qui en résulte, en terme de révélations et de choix finaux. Sur le papier, The Creator est extrêmement classique et un poil prévisible, et pourtant, c’est dans sa superbe mise en abîme que Gareth Edwards transcende un scénario relativement simple. Le film navigue dans une atmosphère SF et fantastique, avant de cueillir son spectateur dans des dernières minutes pleines d’émotions. D’ailleurs, le titre de travail du film, [SPOILER]True Love[/SPOILER], aurait pu nous donner un indice sur la profondeur émotionnelle qui se cache réellement derrière cette histoire !

Dès les premières minutes, The Creator nous plonge dans un univers qui, malgré ses divisions, ne cessent de mêler l’homme et la machine. Des humains améliorés aux androïdes, l’Asie du Sud-Est rurale est le théâtre d’un spectacle visuel saisissant, où la nature sauvage côtoie des structures impossibles, ce qui confèrent une dimension fantastique et irréelle à l’ensemble. L’esthétique cyberpunk rappelle souvent les décors de jeux vidéos et d’œuvres qui évoluaient déjà dans un monde hanté par l’intelligence artificielle (Ghost in the Shell, Blade Runner premier du nom, Alita: Battle Angel…). On pourrait même y déceler des échos de Tenet grâce à la présence de John David Washington, dans cette course effrénée contre le temps, tandis que la confrontation entre deux espèces, pourtant liées par leur histoire, rappelle également la trilogie La Planète des Singes, où la notion d’humanité et de tolérance se réinvente de manière inattendue.

Alors oui, l’histoire est simple, mais Gareth Edwards livre une réflexion profonde sur l’avenir de l’Homme et de ses inventions, tout en conservant son style à travers une réalisation lente, contemplative mais soignée et portée par une imagerie magnifique et inventive. The Creator est sublimée par des effets spéciaux impeccables, depuis ce vaisseau omniprésent et menaçant jusqu’au design des androïdes, qu’ils aient un visage humain ou non. Contemplatif, oui, mais jamais statique ni passif, le film de Gareth Edwards conquiert grâce à ses décors riches, réalistes et renversants.
Finalement, le film de Gareth Edwards nous transporte en terrain familier, où l’émerveillement de voir ce futur proche avec des machines aussi sophistiquées qu’intelligentes, peut rapidement faire froid dans le dos, posant la question douloureuse : si l’homme crée la machine, crée-t-il également sa perte ? Quand on voit la façon dont les androïdes du film agissent avec souvent plus de compassion et de solidarité que les personnages humains, la fin du film apporte encore plus de sens sur le l’élément essentiel de notre existence. Magique.

Au casting, on retrouve donc John David Washington (BlackKklansman, Tenet, Amsterdam…), toujours solide, aux cotés de la jeune et impressionnante Madeleine Yuna Voyles. Autour d’eux, Allison Janney (Mom, Scandale, Moi, Tonya…) est excellente, comme toujours, Gemma Chan (Don’t Worry Darling, Les Éternels, Marie Stuart, Reine d’Écosse…) joue un love interest évanescent mais essentiel à l’intrigue, tandis que Ken Watanabe (Godzilla, Transformers : The Last Knight, Godzilla 2 : Roi des Monstres…), Sturgill Simpson (Queen and Slim, The Hunt…), Marc Menchaca (The Outsider, Ozark…) ou encore Amar Chadha-Patel (Slip, La Roue du Temps…) complètent un casting conquérant.

En conclusion, Gareth Edwards fait un retour saisissant avec The Creator, qui malgré un déroulé plutôt attendu et simple, propose une réflexion superbe et intéressante sur l’avenir de l’humanité et des évolutions technologiques. Entre sens moral et quêtes fondamentales, The Creator qui devrait ravir les amateurs de science-fiction (surtout quand on en a marre de n’entendre que parler du cinéma de Denis « le remaker » Villeneuve…). À voir !

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