Comédie musicale

[COUP DE CŒUR] Wicked, de Jon M. Chu

Le pitch : WICKED retrace l’histoire des sorcières d’Oz, Elphaba et Glinda. Rejetée pour sa peau verte et dotée de pouvoirs insoupçonnés, Elphaba développe une amitié inattendue avec Glinda, populaire et privilégiée, lors de leur rencontre à l’Université de Shiz. Cependant, leur rapport avec Le Magicien d’Oz va mettre à mal cette amitié et voir leurs chemins s’éloigner. Leurs aventures extraordinaires au pays d’Oz les mèneront finalement à accomplir leur destinée en devenant respectivement la Bonne et la Méchante Sorcière de l’Ouest.

Tout le monde le sait, ou presque, Wicked est une comédie musicale qui fait la gloire de Broadway depuis plus de vingt ans. Articulée autour de l’univers du Magicien d’Oz, l’histoire imaginée par Stephen Schwartz en 2003 est devenue culte presque instantanément, grâce à son message universel et, surtout, aux performances vocales incroyables de ses interprètes iconiques : Kristin Chenoweth (Glinda) et Idina Menzel (Elphaba). Avec plus d’un milliard de bénéfices à ce jour, trois Tony Awards et un Grammy, Wicked est devenue la deuxième comédie musicale plus rentable après Le Roi Lion et vise à présent l’Oscar avec l’adaptation de son premier acte sur grand écran.

À la surprise générale, c’est Jon M. Chu qui décroche la réalisation (après le départ du projet de Stephen Daldry), un grand écran étourdissant pour le réalisateur de Sexy Dance 2, GI Joe : Conspiration et Crazy Rich Asians ! Mais en réalité, le pari est plus grand que ça : l’adaptation d’une comédie musicale à succès n’est pas la garantie du succès, et ça, les studios Universal le savent bien puisqu’ils sont à l’origine des films Les Misérables (2012), puis Cats (2019), tout deux réalisés par Tom Hooper et qui ont fait couler beaucoup d’encre (à défaut de faire pleuvoir des dollars).

Pour ma part, comme pour Cats, je ne connaissais Wicked que de noms et par les reprises de sa chanson culte “Defying Gravity”, reprises par tous les coffres plus ou moins talentueux du grand et du petit écran (lorgne du coté de Glee). Mais j’avoue que j’y suis allée qu’avec une vague idée du postulat de départ, mais sans réellement savoir à quoi m’attendre, au-delà du fait que le film de Jon M. Chu part avec deux atouts indéniables : un budget monstre pour assurer la qualité visuelle, esthétique et ambiante du film (150 millions de dollars), ainsi qu’un duo d’actrices et chanteuses à la voix incroyable, Ariana Grande-Butera et Cynthia Erivo. J’admets que pour la seconde, j’étais plus que sceptique car j’ai toujours trouvé que ses performances arrivaient comme un cheveu sur la soupe dans les films où elle se mettait à chanter (Sale Temps à l’Hôtel El Royale, par exemple).

Bref. Trève de blabla, Wicked, ça vaut quoi ?

Et bien j’ai A-DO- !

Dès le premier tableau j’ai été embarqué par l’ambiance légère et riche du film, alors que les personnages sont introduits en musique. Wicked installe rapidement un cadre bercé par le fantastique, dans un monde coloré et pétillant qui charme dès les premières minutes. Dans son ensemble, le film a des allures réconfortantes de contes de fée, reposant sur le charmes de ses personnages mais aussi sur ses décors fantasques et toute la dynamique à la fois joviale et extravagante de l’ensemble. Quelques parts entre un Disney en prises de vue réelles et des ambitions théâtrales assumées, Wicked ensorcèle par sa musicalité maîtrisée et son monde accueillant, même avec les prémices sombres que le film installe à travers une origin story intrigante.

L’univers de Wicked séduit par ses personnages hauts en couleurs et ses contrastes audacieux. Alors que l’on pourrait s’attendre à une interprétation classique de figures emblématiques, le film surprend par l’originalité de son approche. Au cœur du récit se trouve une collision fascinante entre deux mondes diamétralement opposés : le rose éclatant de Glinda, symbole de popularité et de narcissisme flamboyant, et le vert saisissant d’Elphaba, porteuse du rejet paternel et de la peur de ses pouvoirs naissants.
Ancré dans un cadre scolaire, Wicked explore une période charnière où ambitions et rivalités sculptent les identités à venir. Bien que l’âge exact des protagonistes demeure flou, le contexte académique s’impose comme un terrain fertile pour ces personnalités en devenir, donnant au récit une dimension initiatique et captivante.

Simple et naïf en surface, Wicked explore des thèmes universels qui contribuent à son succès : l’amitié, l’acceptation de soi, la quête d’identité, et les dynamiques de rivalité. Elphaba, bien qu’introduite comme la « méchante », devient un personnage fascinant et attachant, marqué par le rejet lié à sa couleur de peau, un élément qui, lors de la sortie du Magicien d’Oz à la fin des années 1930, devait sûrement porter une symbolique sociale encore plus explicite. À ses cotés, G(a)linda, présentée comme un personnage populaire et adoré de toutes, montre peu à peu ses failles et ses craintes de la sortie de route, ce qui ajoute une nouvelle et sympathique dimension à ses allures de Barbie blonde. En allant au-delà des différences personnelles entre ses personnages principaux, la comédie musicale pousse également à réfléchir sur les injustices systémiques. Elle invite le public à questionner les normes établies et, si nécessaire, à se battre pour défendre les opprimés et ce qui est juste, mettant ainsi en lumière des problématiques sociales intemporelles.

Qui dit comédie musicale, dit évidemment chansons et tableaux dansants. À l’instar du film Les Misérables de Tom Hooper, les acteurs de Wicked ont chanté en direct lors des prises de vue. Bien qu’on puisse supposer quelques ajustements en post-production, j’ai été impressionnée par les performances vocales d’Ariana Grande-Butera et Cynthia Erivo, ainsi que Jonathan Bailey, qui interprètent la majorité des chansons. Leur prouesse ne se limite pas à chanter immobiles derrière un micro : pour rester fidèles à l’esprit du spectacle, ils bougent et dansent à travers des scènes magnifiquement chorégraphiées, mettant encore plus en valeur la qualité de leur interprétation. Alors oui, tous les acteurs secondaires n’ont pas le même niveau vocal, mais le résultat est éblouissant, drôle et captivant. J’ai été transportée par cette vague de joie et d’émotion, qui traverse l’écran, jusqu’à un dernier acte impressionnant qui m’a fichu la chair de poule et les larmes aux yeux !

Globalement, les promesses sont posées, le premier défi est relevé. Derrière le film, on devine le poids du rêve devenu réalité des fans de comédies musicales et que Wicked est avant tout fait pour les “theater kids” et les amateurs du genre. Je ne m’attendais pas à être autant embarquée par ce film et maintenant, j’ai hâte de voir ce que le deuxième acte nous réserve pour 2025.

Au casting, pour ma part je n’avais jamais vu Ariana Grande-Butera en tant qu’actrice (étant moi-même trop vieille pour avoir regardé iCarly ou Victorious à l’époque), mais je savais déjà qu’elle a une voix phénoménale et je l’aime bien en tant qu’artiste. Dans Wicked, elle m’a aussi fait mourir de rire dans son incarnation de Glinda, aussi hilarante qu’attachante. À ses cotés, Cynthia Erivo (Pinocchio, Les Veuves, Sale Temps à l’Hôtel El Royale…) m’a rassurée car, comme dit plus haut, j’avais beaucoup de mal avec elle. En Elphaba, elle n’avait pas d’espace pour se planter et elle réussi le défi avec brio, grâce à l’alchimie palpable avec sa co-star et, surtout, sa puissance vocale maîtrisée.

Autour d’elles, on retrouve l’excellent Jonathan Bailey (La Chronique des Bridgerton, Fellow Travelers, Heartstopper…), incroyablement beau conquérant en bellâtre de service, Michelle Yeoh (Transformers : Rise of the Beasts, Avatar : La Voix de l’Eau, Everything Everywhere All At Once…) et Jeff Goldblum (Kaos, Jurassic World : Le Monde d’Après…) complètent un ensemble charismatique, tandis qu’il faudra tendre l’oreille pour reconnaître la voix (en VO) de Peter Dinklage (Hunger Games : La Ballade du Serpent et de l’Oiseau Chanteur, I Care A Lot…), qui s’en sort plutôt pas mal quand il s’agit de pousser la chansonnette (bien qu’il n’en soit pas à son premier essai).
À l’affiche également, on découvre ou retrouve, entre autres, Marissa Bode, Bowen Yang (SNL…), Bronwyn James (Slow Horses…), Adam James (You…), Keala Settle (The Greatest Showman…) et Ethan Slater (Fosse/Verdon…).
Quelques caméos sont également à prévoir…

En conclusion, Wicked de Jon M. Chu est une adaptation éblouissante et émouvante, qui réussit à captiver par son univers enchanteur, ses performances vocales impressionnantes et son message universel. Une expérience à la fois drôle, spectaculaire et profondément touchante, qui séduira les fans comme les néophytes. À voir.

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