Avec Doctor Strange in the Multiverse of Madness, Marvel Studios offrent enfin des retrouvailles avec un MCU en grande forme ! Malgré un changement de réalisateur en cours de route, le film est porté par la patte singulière de Sam Raimi, ce qui apporte des détours horrifiques surprenant dans un format habituellement balisé. Résultat, en plus d’explorer les pouvoirs de nos sorciers, le film est une aventure effrénée dans un multiverse aux possibilités affolantes, rehaussée par une écriture soignée qui étoffe les personnages principaux et des références bien plus proches des comics que le simple fan service. Accrochez-vous à vos sièges : d’un univers à l’autre, Doctor Strange in the Multiverse of Madness est bien décidé à entamer sérieusement la nouvelle saga du MCU.
Le pitch : Plusieurs mois après les événements liés à Spider-Man : No Way Home, Docteur Strange va devoir traverser les hallucinantes et dangereuses réalités alternatives du Multiverse. Afin de pouvoir faire face à ce grand périple, Strange sollicite l’aide de Wanda Maximoff, qui est devenue la Sorcière Rouge et possède désormais d’immenses pouvoirs. Strange, quant à lui, va rencontrer America Chavez, une mystérieuse adolescente capable de créer des portails vers d’autres univers.
En 2016, Doctor Strange faisait ses premiers pas sur grand écran dans une origin story nécessaire mais dont l’aspect lisse m’avait un chouille laissée sur le carreau. Ce n’est qu’après plusieurs revisionnages, pour ma part, puis la présence de Doctor Strange dans les films événements Avengers – Infinity War et Avengers – Endgame, que l’intérêt du personnage a pris de l’ampleur dans le MCU. Si certains murmuraient déjà que Doctor Strange pourrait bien être le leader des nouveaux Avengers, il s’avère pourtant que le Sorcier Suprême a bien d’autres chats à fouetter avant de diriger l’escouade terrestre de super-héros la plus puissante, et c’est bien ce que Doctor Strange in the Multiverse of Madness vient explorer dans un opus fascinant.
Ce film était probablement la plus grosse attente des fans depuis Avengers – Endgame (je ne compte pas Spider-Man – No Way Home dans le MCU, malgré la présence de notre héros). En effet, Black Widow s’est avéré tout juste correct malgré sa sortie trop tardive, Shang-Chi et la Légende des Dix Anneaux a satisfait les amateurs de blockbusters marveliens tout en distillant clairement une ambition d’incarner ses personnages à travers la culture asiatique fantaisiste, tandis que Les Éternels a surtout divisé entre sa beauté esthétique et son approche moins frontale et plus dramatique. Ajoutons à cela l’arrivée des séries Disney+ qui déferlent sur le petit écran depuis 2021 : WandaVision, Loki, The Falcon & The Winter Soldier, Hawkeye, What If…? et actuellement Moon Knight, les Studios Marvel s’affairent à nous maintenir en haleine. Sauf que, surprise surprise, les séries Disney+ semblent vouloir surtout s’attarder sur la psychologie de ses personnages (deuil, culpabilité, rédemption, devoir, folie…) au lieu de proposer des mini-films super-héroïques pleine d’action. Une nouvelle intrigue au puzzle, puisqu’en plus de personnages inédits, le mystère restait entier sur l’intérêt de ces adaptations télévisées. Du coup, la sortie d’un film porté par un super-héros déjà connu représentait une promesse pour les fans qui, comme moi, se demandent qui sera assez grand, fort et fou pour succéder à Thanos.
La bonne nouvelle, c’est que toutes ces heures devant le petit écran n’auront pas servi à rien : WandaVision, Loki et quelques épisodes de What If…? feront partie des fondamentaux à réviser pour mieux comprendre certains enjeux de Doctor Strange in the Multiverse of Madness. Mais rassurez-vous : en bon film Marvel Studios, ce nouvel opus saura combler les creux si vous avez failli à vos devoirs.
Porté par Sam Raimi, qui a repris les rênes après le départ de Scott Derrickson sur le projet, Doctor Strange in the Multiverse of Madness pose une empreinte écarlate sur le format du MCU. Ce deuxième opus solo a des allures de parcours initiatique inhérent aux « films numéros 2 », mettant son personnage face à ses responsabilités (exemple : Iron Man 2, Captain America : The Winter Soldier…). Alors qu’on le découvre encore auréolé par ses actions pendant l’affrontement contre Thanos, Doctor Strange voit ses choix découler sur sa vie privée, tandis que de son coté, Wanda Maximoff préfère rester à l’écart suite aux événements de Westview. Certes, les codes Marvel sont toujours présents, mais grâce à un démarrage sur les chapeaux de roue, le film délaisse rapidement l’humour léger pour nous embarquer dans une tonalité plus mature et souvent sombres, aux détours d’un multiverse surprenant. Créatures, univers différents et alter-egos s’empilent dans un récit à la fois simple mais à l’exécution alambiquée pour animer les 2h11 de film (générique compris).
Si vous pensiez que les spot TV en avait trop dire, rassurez-vous : Marvel Studios toujours maîtrise l’art d’entretenir le suspens vers des fausses pistes et a également su apprendre de ses erreurs. En effet, au-delà du grand spectacle en CGI (inévitable) que propose le film, Doctor Strange in the Multiverse of Madness creuse les motivations de son antagoniste, évitant avec brio l’éternel rôle manichéen qui veut juste du pouvoir pour le simple plaisir de son orgueil. À l’image des séries TV, le film repose bien plus sur la psychologie de ses personnages, montrant un Doctor Strange, à la blague moins facile et dans un film plus sombre où son rôle va l’obliger à faire des choix difficiles, tandis que l’autre Avenger présent sur l’affiche joue les équilibristes entre ses pouvoirs et ses émotions. Un énorme point fort qui devrait ravir (ou faire encore plus rager) les mauvaises langues puis que ce Doctor Strange in the Multiverse of Madness ne se cache pas derrière ses effets spéciaux pour en mettre plein la vue et va, au contraire, soigner ses personnages pour proposer plus de reliefs autour de leurs motivations.
En fait, ce film va ouvrir, grâce au multiverse, la vaste étendue des possibilités de prochains films, à travers des alter-egos surprenants ou l’apparition de certains personnages (déjà vus ou non dans le MCU, mais toujours bien connus des comics). Doctor Strange in the Multiverse of Madness parvient à la fois à cocher la case du divertissement – la base pour un film Marvel Studios me direz-vous – tout en posant des bases alléchantes et prometteuses pour un MCU qui ne fait que s’agrandir. Les surprises sont aux rendez-vous et cela faisait longtemps qu’un film Marvel ne m’avait pas hypée en cours de route : certains moments m’ont fait décollé de mon siège. Alors c’était souvent de l’excitation, mais… et oui ! parfois c’était un peu de frissons !
En effet, dès l’annonce du film, à l’origine porté par Scott Derrickson, il était entendu que Doctor Strange in the Multiverse of Madness aurait des pendants horrifiques. Mais la défection du réalisateur en janvier 2020 a eu l’effet d’une douche froide, car vu la filmographie de ce dernier, cela aurait dû être pile dans ses cordes. Pourtant, un mois plus tard, c’est Sam Raimi qui est annoncé comme nouveau réalisateur du film. Si beaucoup le connaissent grâce à la première trilogie Spider-Man, c’est notamment un réalisateur et producteurs de films d’horreur (dont le culte Evil Dead). Du coup, c’était un choix rassurant, mais connaissant la main ferme des studios Marvel et leurs ambitions habituellement très familiales en ce qui concernent leurs films de super-héros, j’ai eu peur de voir le film ultra lissé pour faciliter l’accès au grand public.
Et bien… même si j’ai une tolérance élevé au film d’horreur et que c’est loin d’en être un, je déconseillerais tout de même Doctor Strange in the Multiverse of Madness aux plus jeunes (moins de 10-12 ans). En effet, Sam Raimi apporte beaucoup à la franchise et propose un visuel bien plus stylisé et remarquable dans le giron du MCU. Entre frissons et images un poil gore (ambiance zombie, jumpscares, images explicites…) le réalisateur pose ses marques dès les premières minutes du film, jusqu’à laisser filtrer de nombreux moments de noirceur jubilatoires et surprenants. Oui, j’ai sursauté à un moment mais qu’on se rassure : il n’y a ni violence graphique extrême ni horreur classique, c’est surtout l’ambiance du film qui donne cette dimension souvent terrifiante et qui diffère des produits Marvel habituels. Cependant, Certaines images pourraient donc impressionner les plus jeunes. Rappelant largement un des épisodes de la série What If…?, plusieurs scènes sont un régal et rappellent agréablement que le maître à bord est un expert en épouvante.
Au-delà de ces détours flippants, Doctor Strange in the Multiverse of Madness est aussi porté par une cinématographie superbe qui, d’accord, fleure bon le numérique, mais s’accorde très bien à tonalité fantastique du film et du personnage de Doctor Strange – grand adepte de la Dimension Miroir devant l’Eternel. Images fractales, mondes effondrés, photographie tantôt lumineuses et tantôt crépusculaires, le film de Sam Raimi s’autorise des plans originaux et généreux, parvenant à rendre l’ensemble hyper lisible. Seuls les voyages entre univers peuvent dérouter, mais dans l’ensemble le résultat est plutôt réussi. Sam Raimi peut également compter sur son compositeur fétiche, Danny Elfman (Darkman, Spider-Man 1 et 2, Le Monde Fantastique d’Oz…) qui va nourrir le film d’une bande-originale intéressante, dont notamment une scène assez cool qui repose entièrement sur un des morceaux (même si les sonorités du thème Doctor Strange composé par Michael Giacchino m’ont un peu manquées). Alors que j’avais peur de voir Sam Raimi étriqué dans les codes Marvel, il parvient finalement à jongler avec l’ambition récréative du studio et sa patte horrifique sans pour autant dénature l’un ou l’autre. Comme quoi, ça vaut le coup d’engager des réalisateurs accomplis aussi !
Alors évidemment, tout ça, je vous le déballe à chaud, mais vous l’aurez compris : j’ai beaucoup aimé Doctor Strange in the Multiverse of Madness ! Je pourrais chipoter et parler du fait que Doctor Strange montre des pouvoirs impressionnants qui auraient été plus utiles que des petits papillons verts pour repousser Thanos, c’est vrai… En terme de rythme, le film fait honneur à la mention « Madness » de son titre en proposant une course contre la montre (ou plutôt contre l’ennemi) qui nous fera voyager un bon moment, même si, dans son dernier acte, l’effervescence constante finit presque par épuiser et créer quelques longueurs. Et pourtant, si le dernier tiers du film ralentit et échappe aux règles, il vaut tout de même le détour, car si Doctor Strange in the Multiverse of Madness reste porté par une histoire simple et des affrontements qui auraient pu être plus épiques, les motivations de l’antagoniste du film étoffe l’ensemble (d’ailleurs, le sous-titre Multiverse of Madness prend tout son sens dans le film, si on considère son acronyme *wink wink* voilà pourquoi ça n’a pas été traduit en français).
Cependant, je pardonne les problèmes de rythme de Doctor Strange in the Multiverse of Madness , car j’apprécie davantage le fait que ce film ait ravivé mon envie de me perdre dans des théories et spéculations pour la suite, ce qui ne m’était plus arrivée depuis un moment (Avengers – Infinity War, peut-être). Si les derniers films Marvel Studios m’ont plu, ils manquaient tout de même de promesses pour la suite, optant plus souvent sur du fan service instantané que sur la complétion d’un récit qu’on ne pouvait qu’analyser sans véritablement se projeter. Pour la première fois depuis l’après Thanos, Marvel Studios nous offre un film avec juste ce qu’il faut d’excitation sans se répandre dans le caméo ou l’easter egg et en se reposant sur du teasing directement lié aux comics, mais chut – on aura le temps de revenir sur le sujet.
Au casting : quelques mois après Spider-Man – No Way Home, Benedict Cumberbatch (La Bulle, The Power of the Dog, Un Espion Ordinaire…) ne quitte plus ses habits de sorcier ! Toujours impeccable dans son personnage, l’acteur a cette fois l’occasion de sortir de son rôle pour explorer d’autres versions. Une balade au parc pour cet acteur confirmé qui ne déçoit jamais. À ses cotés, Elizabeth Olsen (WandaVision, Sorry For Your Loss, Wind River…) porte beaucoup du film sur ses épaules, grâce un rôle traversé par ses émotions qu’elle interprète à merveille – elle est indéniablement un grand des grands atouts du film. À l’affiche également, on retrouve des visages connus : Rachel McAdams (Game Night, Désobéissance, Spotlight…) et Benedict Wong (Gemini Man, Seul Sur Mars…) sont plus présents et plus aguerris, tandis que Chiwetel Eijofor (Locked Down, Maléfique : Le Pouvoir du Mal, Le Roi Lion…) rempile et que Michael Stuhlbarg (Dopesick, Your Honor, La Forme de l’Eau…) fait une apparition. Coté nouveaux venus, on découvre Xochitl Gomez (Les Baby-Sitters…) en America Chavez (Miss America pour les intimes) qui, malgré un personnage central à l’histoire, ne laisse vraiment une grande impression. En même temps, vu le casting qui l’entoure c’est compréhensible.
Ensuite, il y a également beaucoup, BEAUCOUP, de surprises… mais on y reviendra plus tard.
En conclusion, le film s’est fait attendre mais il en valait la peine. Sam Raimi signe un film étonnant par sa forme et conquérant par le fond. Entre frissons, enjeux et émotions, Doctor Strange in the Multiverse of Madness est une mise en abîme intéressante du concept du multiverse, plus proche et un poil plus sérieuse, renforcée par des références aux comics plus opportunes que du simple fan service. À voir, évidemment.
PS : il y a 2 scènes bonus pendant et après le générique (bien que la seconde soit plus légère). Comme d’habitude, on en reparle bientôt.
PS : ce film a été interdit dans certains pays à cause de personnages LGBT. Quand on voit la scène en question, l’interdiction devient encore plus débile.