
En pleine « super-héros fatigue », les studios Marvel continue de dérouler leur Phase 5, certes avec un poil moins de panache qu’auparavant. Réalisé par Nia DaCosta, The Marvels propose une aventure sympathique et parvient à trouver un équilibre palpitant entre l’humour, la dynamique familiale et des scènes d’action spectaculaires, ravivant les éléments essentiels du MCU. Bien qu’un brin hâtif et toujours prompt à survoler ses quelques ressorts dramatiques, le film se révèle plutôt efficace, même si on est loin de retrouver l’excitation de l’Infinity saga.
Le pitch : Carol Danvers, alias Captain Marvel, doit faire face aux conséquences imprévues de sa victoire contre les Krees. Des effets inattendus l’obligent désormais à assumer le fardeau d’un univers déstabilisé. Au cours d’une mission qui la propulse au sein d’un étrange vortex étroitement lié aux actions d’une révolutionnaire Kree, ses pouvoirs se mêlent à ceux de Kamala Khan – alias Miss Marvel, sa super-fan de Jersey City – et à ceux de sa « nièce », la Capitaine Monica Rambeau, désormais astronaute au sein du S.A.B.E.R. D’abord chaotique, ce trio improbable se retrouve bientôt obligé de faire équipe et d’apprendre à travailler ensemble pour sauver l’univers.
4 ans après Captain Marvel réalisé par Anna Boden et Ryan Fleck, c’est au tour de la réalisatrice afro-américaine Nia DaCosta (Little Woods, Candyman…) de proposer une suite intitulée The Marvels, pour continuer de raconter l’aventure d’une des super-héros les plus puissants de l’univers. À l’époque coincé entre Avengers – Infinity War et Avengers – Endgame, Captain Marvel a eu la lourde tâche de s’inscrire comme une respiration entre deux événements colossaux. Entre girl power et ambiance 90s, le film d’Anna Boden et Ryan Fleck proposait une origin story aux codes classiques et divertissants. Seul véritable bémol : difficile d’enthousiasmer le public avec un personnage aussi puissant sans rendre inutile les premiers Avengers, ceux que l’on suit depuis le début (soyons honnêtes, sur le papier Captain Marvel – et Scarlet Witch – aurait pu aisément éliminer Thanos). Résultat, l’écriture du personnage tente de freiner ses ardeurs, ce qui s’est ressenti sur son parcours, notamment son apparition tardive (mais explosive) dans Avengers – Endgame.

Avec The Marvels, l’histoire reprend là où on l’avait laissée, tout en incluant deux personnages liés de près ou de loin à Carol Danvers : Captain Rambeau, découverte adulte dans WandaVision, et Kamala Khan aka Ms Marvel, la fangirl inconditionnelle révélée dans la série Ms Marvel. Encore une fois, le retour de l’héroïne flamboyante sur grand écran se fait dans la douleur : alors que Captain Marvel faisait office de pansement en attendant Endgame, le public était assurément au rendez-vous. Aujourd’hui, The Marvels sort en pleine « super-hero fatigue », après une série de films et séries télé mitigés ou décevants et un paysage morose où tous les films de super-héros semblent être à bout de souffle et/ou à court d’idées (Marvel, Warner, Sony, tout confondu). Le genre a du mal à se renouveler et à séduire à nouveau son public, notamment coté Marvel qui a déroulé une Phase 4 dense mais peu qualitative. Résultat, post-Endgame, les produits Marvel Studios qui ont enchanté les fans se comptent sur les doigts d’une seule main !
Alors, que vaut le 33e film du MCU ?

La bonne nouvelle, c’est que grâce à des attentes largement revues à la baissent, quand un film parvient à fonctionner et à divertir, cela devient facilement une bonne surprise (même si je ne sais pas si ce constat est une bonne chose). Si les films Marvel avaient toujours le vent en poupe, je pense que The Marvels aurait été bien plus dense. En effet, au cours de la post-production, le film de Nia DaCosta a été allégé et sa durée raccourcie à moins de deux heures. On découvre donc une histoire qui va à l’essentiel et qui ne s’attarde pas trop à raccrocher les wagons pour ceux qui n’auraient pas suivi WandaVision ou Ms Marvel. Une bonne chose cette fois donc, alors que le film se précipite dans le vif du sujet avec des séquences d’action dynamiques et une imagerie impeccable qui rappellent les belles heures du MCU.

Toujours moulé dans un format tout public, The Marvels utilise la déroute des personnages principaux et leurs pouvoirs qui s’interchangent pour apporter de la surprise et créer une certaine forme d’anticipation chez le spectateur – surtout lorsque la jeune et moins expérimentée Kamala se retrouve à la place de Carol Danvers, alors que cette dernière est en plein affrontement musclé. Rapidement, le film trouve son équilibre entre le comique de situation et les enjeux du film, tout en se reposant assez souvent sur la personnalité solaire et rafraichissante de Ms Marvel. Coloré et porté par une énergie plutôt contagieuse, The Marvels renoue avec les codes familiers du MCU : humour, famille et beaucoup d’action à la mise en scène spectaculaire, tout en se permettant des petits paris insolites pour sortir du lot (une avalanche de chats ou une séquence musicale par exemple).

Ce qui est positif également, c’est que The Marvels se repose essentiellement sur sa propre histoire et les liens entre les personnages (et leurs univers respectifs) pour faire avancer son récit, sans chercher à nous appâter en mentionnant les Avengers ou autre rappel du passé à tort et à travers. Que faisait Carol Danvers depuis les années 90 et quel est son rôle aux cotés de Nick Fury depuis ? Le film répond à ces questions, tout en utilisant le trio de super-héroïnes pour approfondir la trame. En effet, c’était assez intelligent de miser sur une équipe de super-héro(ïne)s pour The Marvels, d’une part pour adoucir le personnage central qui n’avait pas forcément fait l’unanimité après Captain Marvel, et, d’autre part, pour continuer cette nouvelle tradition du passage de flambeau qu’on retrouve dans la plupart des films et séries télé du MCU depuis la Phase 4.

Visuellement, The Marvels comportent beaucoup de scènes d’action et donc se repose pas mal sur des effets spéciaux. J’ai apprécié la lisibilité des affrontements et la photographie très lumineuse du film. Même si les acteurs évoluent essentiellement dans des fonds verts ou bleus, le résultat reste convaincant bien qu’impersonnel. Là où un James Gunn proposait un univers aux apparences très organiques pour ses Gardiens de la Galaxie, The Marvels conserve l’identité graphique ciselée et propre des studios. Pas déplaisant, mais pas original non plus.

Alors oui, il y a quand même des petits défauts. Sans pour autant rendre l’ensemble désagréable, The Marvels souffre aussi des points faibles connus de Marvel Studios, notamment dans la façon de recourir au « comic relief » plutôt que de laisser des moments dramatiques faire effet. Malgré certains détours qui auraient mérité qu’on s’y attarde (la destruction d’une planète et autres choix complexes), le film de Nia DaCosta se précipite d’une scène à l’autre sans jamais laisser le temps au spectateur d’assimiler ce qu’il vient de voir et ses possibles conséquences. C’est d’autant plus embêtant du point de vue de Kamala Khan, dont la jeunesse et le manque d’expérience ne sont pas vraiment pris en compte lors de ces moments qui auraient pu être marquants. Autre sujet : les fils conducteurs en suspens qui hantent le MCU depuis la Phase 4. En effet, de Shang-Chi à Doctor Strange 2, en passant The Eternals ou des séries comme Loki, Marvel Studios a lancé pas mal d’intrigues qui, jusqu’à présent, semblent au point mort ou évoluent avec la lenteur d’un escargot anémique.

Globalement, à l’heure où on ne sait plus quoi attendre des films de super-héros, The Marvels se révèle plutôt rassurant et efficace. Si Marvel Studios n’a pas encore retrouvé sa gouaille d’antan, ils sont toujours capable de proposer des personnages et des histoires fédératrices, même avec un déroulé finalement assez classique. Ceci étant dit, certains films récents ont essayé de suivre un storytelling classique et se sont totalement vautrés dans l’exercice, alors…

Au casting, Brie Larson (Fast and Furious 10, La Voie de la Justice, Kong: Skull Island…) reprend du service, entourée par Teyonah Parris (WandaVision, Candyman, Dear White People…) et Iman Vellani (Ms Marvel…) – qui s’offre ici sont premier rôle sur grand écran. Le trio fonctionne super bien, s’appuyant sur la personnalité de chacune pour créer une dynamique attachante et un rythme enthousiaste. J’ai apprécié le fait que les personnages soient tous mis au même niveau, notamment celui de Ms Marvel qui aurait pu être mis au coin à cause de sa jeunesse. Ici, The Marvels joue la carte du travail d’équipe avec brio (même si on peut se demander comment Kamala a appris à se bastonner ainsi) et c’est véritablement le point fort du film. Face à elle, Zawe Hiddleston Ashton (Velvet Buzzsaw, Greta, Nocturnal Animals…) joue les antagonistes et a bien du mal à succéder à Lee Pace en tant que vilain Kree de service.
À l’affiche également, Samuel L. Jackson (Hitman and Bodyguard, Kingsman – Services Secrets, Glass…) s’amuse bien plus ici que dans la série Secret Invasion, on retrouve également Mohan Kapur, Zenobia Shroff et Saagar Shaikh, tandis que Park Seo-Joon (Parasite…) fait des premiers pas étonnants dans le Marvelverse.
Évidement, il y a quelques surprises, mais on en reparlera plus tard (même si l’une d’entre elle a été révélée dans la dernière bande-annonce).
En conclusion : oui, les films de super-héros n’excitent plus autant qu’avant. Pour un Gardiens de la Galaxie Vol. 3, un The Batman ou un Spider-Man – Accross The Spider-Verse, il a fallu endurer Thor Love and Thunder ou encore Ant-Man : Quantumania (pour ne pas mentionner The Flash, Morbius ou Black Adam chez la concurrence). S’il est beaucoup trop tôt pour avancer que Marvel Studios est « de retour », The Marvels s’inscrit comme un film solide et efficace, porté par un trio féminin, puissant et attachant, permettant de faire évoluer les personnages. Si le lien avec un plan plus vaste sur cette saga du Multiverse reste néanmoins discret, Nia DaCosta signe un épisode divertissant, qui mérite largement qu’on lui donne sa chance. Le risque ? Passer un bon moment ! À voir.

PS : il y a une scène bonus dans le générique et, hmmm…, un son à la toute fin. On en reparle bientôt ^^
